La vie d’un groupe est ponctuée par des entrées et sorties de périmètre résultant de sa stratégie. Le groupe peut également participer à des opérations portant sur les capitaux propres des entités consolidées. L’ensemble de ces opérations se regroupe sous le terme de variations de périmètre, nous allons dans ce cours identifier les principales d’entre elles.
Nous examinerons ensuite l’incidence de ces opérations sur la présentation des comptes consolidés.
LES PRINCIPALES CAUSES DE VARIATION DE PÉRIMÈTRE
Elles concernent comme nous l’avons dit :
- les entrées dans le périmètre ;
- les sorties de périmètre ;
- les variations du pourcentage d’intérêt du groupe avec ou sans changement de méthode de consolidation.
Le tableau ci-dessous recense les principales variations de périmètre.
Les variations de périmètre résultent en définitive soit d’une variation dans le nombre de titres détenus par le groupe dans une entreprise soit de la variation du nombre de titres émis par cette entreprise. Ces variations conduisent éventuellement à une remise en cause du contrôle exercé sur une entité et/ou d’une modification du pourcentage d’intérêt.
Ces variations de périmètre altèrent la comparabilité des comptes entre deux exercices et sont une difficulté pour l’analyse. Pour cette raison, les groupes en application du principe de comparabilité des comptes, doivent indiquer en annexe les circonstances qui empêchent de comparer les états financiers d’un exercice sur l’autre.
L’information peut également prendre la forme de compte pro forma présentant les comptes de l’exercice clos et ceux de l’exercice précédent selon le même périmètre.
ENTRÉES DANS LE PÉRIMÈTRE DE CONSOLIDATION
L’entrée dans le périmètre de consolidation et la comptabilisation des regroupements d’entreprises ont donné lieu à d’amples développements comptables et à des méthodes de comptabilisation non homogènes entre les différents référentiels comptables.
Cette diversité ne facilitait pas à l’évidence l’approche des comptes consolidés. La norme IFRS 3 publié en mars 2004, relative aux opérations de regroupement constitue une étape importante d’un processus d’harmonisation de ces opérations. La publication en janvier 2008 de la norme IFRS 3 et d’IAS 27 clôt ce processus. À présent, nous avons une méthodologie unique qui s’inscrit dans le droit fil de la norme américaine FAS 141.
Une seule méthode comptable est reconnue par le référentiel IAS/IFRS : la méthode de l’acquisition (purchasing method). Sa mise en œuvre se déroule en plusieurs étapes :
- définition de l’acquéreur et de la date d’entrée dans le périmètre ;
- détermination du coût d’acquisition des titres ;
- affectation du coût d’acquisition ;
- détermination de l’écart d’acquisition.
La méthode de la mise en commun d’intérêts (pooling of interest) a été supprimée, elle se fondait sur l’idée qu’il n’y avait pas d’acquéreur et donc pas d’écart d’acquisition. Cette méthode conduisait à comptabiliser les actifs et passifs à leur valeur comptable sans réévaluation à la juste valeur. Elle entraînait deux avantages : l’absence de goodwill et une minoration des capitaux propres par rapport à la méthode de l’acquisition.
Définition de la date de prise de contrôle
La date d’acquisition est la date à laquelle le contrôle de l’actif net et des activités de l’entreprise acquise sont effectivement transférés à l’acquéreur.
L’entrée dans le périmètre de consolidation est effective :
- soit à la date d’acquisition des titres par l’entreprise consolidante ;
- soit à la date de prise de contrôle, si l’acquisition des titres s’est effectuée en plusieurs opérations ;
- soit à une date contractuelle, si le transfert du contrôle se réalise à une date différente de celle du transfert des titres.
La date d’entrée dans le périmètre conditionne la prise en compte des données comptables de l’entité acquise. Les actifs et passifs acquis sont constatés à leur juste valeur à la date d’acquisition, le compte de résultat consolidé ne comprend que les charges et produits postérieurs à la date de prise de contrôle.
Par souci de simplification, le groupe essaie de faire correspondre la date de prise de contrôle avec une date d’arrêté comptable. Comme nous le verrons ultérieurement, cette règle nécessite d’être vigilant lorsque l’on analyse des groupes où des acquisitions ont été réalisées en cours d’exercice.
En effet, les comptes consolidés peuvent ne comprendre qu’une fraction du compte de résultat de l’entité acquise au cours de l’exercice.
Le groupe fromager BEL a pris le contrôle du groupe néerlandais Leerdammer au 31 décembre 2002. Les états financiers du groupe BEL n’incluent pas le compte de résultat mais uniquement le bilan du groupe Leerdammer. Cette opération de taille significative fausse les ratios mettant en relation des postes de bilan et de compte de résultat.
Le coût d’acquisition
Le coût d’acquisition comprend le prix d’acquisition remis au vendeur. Le montant de la rémunération remis au vendeur correspond à la juste valeur des actifs apportés et des passifs pris en charge ainsi que des instruments de capitaux propres émis par l’acquéreur au moment de la prise de contrôle de la cible.
Cette définition permet d’englober toutes les modalités d’acquisition : paiement en liquidités, remise de titres en rémunération de l’acquisition…
Affectation du coût d’acquisition
À l’issue de la détermination du coût d’acquisition, il importe à présent d’identifier les actifs acquis et passifs supportés de la cible. Chacun de ces actifs et passifs doit être évalué à sa « juste valeur » et comptabilisé séparément. L’évaluation à la « juste valeur » consiste à déterminer la valeur d’un actif ou d’un passif pris individuellement, comme si celui ci avait fait l’objet d’une transaction séparée.
La première consolidation peut en outre amener à identifier de nouveaux actifs ou passifs dans les comptes de la cible. La différence entre le coût d’acquisition des titres et la juste valeur des actifs et passifs acquis représente l’écart d’acquisition (ou goodwill).
En pratique, cette règle soulève des difficultés essentiellement pour les actifs incorporels et les provisions pour risques et charges.
Identification des immobilisations incorporelles
Les actifs incorporels de la société cible doivent être reconnus dans le bilan de l’acquéreur, même s’ils ne le sont pas dans le bilan de la société cible.
Cette reconnaissance s’effectue selon les règles et critères énoncés par la norme IAS 38 . Les dispositions de la norme IAS 38 conduisent généralement à identifier lors d’un regroupement d’entreprise les actifs incorporels suivants :
- domaine marketing : marques, logos, noms de domaine, titres de journaux, accords de non-concurrence ;
- domaine lié aux clients : portefeuille de contrats, carnets de commandes ;
- domaine lié aux contrats : accords de location, droits de diffusion, accords de royalties ;
- domaine lié aux technologies : coûts de développement, brevets, logiciels.
Par contre, ne peuvent être reconnus comme des actifs incorporels les éléments liés au capital humain ou les parts de marché bien que ceux-ci représentent souvent une composante importante de la valeur de la cible. Ces éléments sont compris dans l’écart d’acquisition car ils ne peuvent faire l’objet d’actifs identifiables.
Ces règles devraient conduire à reconnaître davantage d’actifs incorporels et donc à diminuer le montant des écarts d’acquisition.
Identification des passifs générés par l’acquisition
L’entrée dans le périmètre d’une entité (ou regroupement selon les termes utilisés par la norme IFRS 3) peut entraîner l’apparition de nouveaux passifs.
L’acquéreur a intérêt à anticiper des coûts futurs par des provisions dans le cadre de la comptabilité d’acquisition. Ces provisions conduiront certes à accroître mécaniquement la valeur de l’écart d’acquisition mais leur reprise améliorera le résultat des exercices futurs.
La norme IFRS 3 réglemente précisément les modalités d’affectation au coût d’acquisition des coûts de restructuration et des passifs éventuels.
• Coût de restructuration
La norme IFRS 3 limite désormais les possibilités de constater, lors de l’acquisition des passifs ou provisions de restructuration. En effet, ces provisions pour restructuration ne pourront être constatées que si elles constituent déjà un passif dans la société acquise à la date de l’acquisition. En outre, cette provision doit être évaluée conformément à la norme IAS 37 .
Le plan de restructuration d’une entreprise acquise décidé par l’acquéreur ne peut faire l’objet d’une provision dans le cadre de cadre de la comptabilité d’acquisition. Il s’agit d’une évolution significative par rapport à la norme IAS 22 qui autorisait la prise en compte des provisions de restructurations décidées par l’acquéreur.
Cette disposition conduit nécessairement les groupes à une plus grande vigilance dans leurs opérations de croissance externe. Ces coûts de restructuration en effet affecteront le résultat du groupe postérieur à l’acquisition.
• Les passifs éventuels
La réalisation d’une opération de regroupement peut transformer un passif éventuel en passif. Prenons l’exemple d’une indemnité qu’une entreprise s’engage contractuellement à verser à un client si elle est rachetée par un concurrent de ce client. Tant que l’entreprise n’est pas rachetée, ce passif n’est qu’éventuel. Si le rachat intervient, cet engagement se transforme en passif comptabilisé.
Cette nouvelle provision vient donc augmenter l’écart d’acquisition. La norme IFRS 3 cite le cas d’obligations souscrites par la société cible, antérieurement à l’acquisition, à l’égard d’employés ou de fournisseurs et qui la conduisent à verser en cas de changement de contrôle des indemnités de rupture.
Détermination de l’écart d’acquisition
L’écart d’acquisition se calcule par différence entre le coût d’acquisition des titres et la quote-part d’intérêt acquise dans l’actif net de l’entreprise cible (actifs/passifs) évaluée à la juste valeur à la date d’acquisition. Il représente, le complément de prix que l’acquéreur accepte de payer au-delà de la valeur patrimoniale. Ce complément de prix se justifie par les perspectives de rentabilité future de l’entité acquise.
La norme IFRS 3 révisée introduit la possibilité pour les groupes d’évaluer le goodwill en y incorporant la part des minoritaires. De cette façon, les comptes consolidés privilégient l’approche de l’entité économique en traitant de façon identique les actionnaires majoritaires et minoritaires. Cette pratique conduit à une majoration des intérêts minoritaires et du goodwill.
ou
Coût d’acquisition des titres = Quote-part de SM dans F × [Juste valeur des actifs (F) – Juste valeur des passifs (F)] + Écart d’acquisition
Ou
Écart d’acquisition = Coût d’acquisition des titres – Quote-part de SM dans F × [Juste valeur des actifs (F) – Juste valeur des passifs (F)]
Si la consolidation s’effectue par intégration globale, l’incidence de cette entrée dans le périmètre sur les comptes du groupe est la suivante :
Le groupe SM a acquis 60 % de la filiale F pour un montant de 250.
La juste valeur des actifs de F à la date d’acquisition est évaluée à 180, la juste valeur des passifs à 80.
L’écart d’acquisition s’élève à :
Écart d’acquisition = Coût d’acquisition – % SM [juste valeur des actifs de F – juste valeur des passifs de F]
Écart d’acquisition = 250 – 60 % × (180 – 80) = 190
Les intérêts minoritaires représentent la quote-part de l’actif net évalué à la juste valeur, non détenue par le groupe. Ils s’élèvent à :
Intérêts minoritaires = 40 % × (180 – 80)
L’incidence sur les comptes consolidés du groupe de l’entrée de F dans le périmètre de consolidation est donc :
Comme nous le constatons une entrée dans le périmètre de consolidation n’a pas d’incidence sur les capitaux propres consolidés part du groupe, le calcul de l’écart d’acquisition permet d’aboutir à ce résultat. Effectivement, l’acquisition d’une entité ne génère ni enrichissement, ni appauvrissement pour le groupe.
Généralement, la première consolidation ne peut se faire que sur une base provisoire. En effet, la détermination de la juste valeur des actifs et passifs nécessite de conduire un processus d’évaluation qui n’est généralement pas achevé dès la première clôture consécutive à l’acquisition.
Pour cette raison, la norme IFRS 3 définit une période d’ajustement du goodwill de 12 mois à compter de la date d’acquisition. Au-delà de ce délai, les révisions de valeur éventuelles correspondent à des corrections d’erreur, qui conduisent à retraiter les comptes de manière rétrospective comme si les erreurs n’étaient jamais intervenues.
Dans certains cas, l’écart d’acquisition est négatif, cela signifie que le coût d’acquisition des titres est inférieur à la quote-part dans l’actif net de l’entité acquise. Cet écart d’acquisition représente un profit qui doit être immédiatement inscrit en résultat.
Notons que dans d’autres référentiels l’écart d’acquisition négatif est inscrit au passif en provision pour risques et charges ; cette provision fait ensuite l’objet d’une reprise étalée sur plusieurs exercices.
Les écarts d’acquisition ne sont plus amortissables, ils sont soumis à présent annuellement au test de dépréciation afin de s’assurer que leur valeur actuelle à la clôture est toujours au moins égale à leur valeur comptable.
SORTIE DE PÉRIMÈTRE
Une entreprise sort du périmètre de consolidation à la date de perte de contrôle ou d’influence notable. La perte de contrôle s’effectue par une cession partielle ou totale de titres. Elle peut également intervenir sans cession de titres, à la suite par exemple d’une augmentation de capital d’une entité consolidée, non souscrite par le groupe.
Une cession de titres va conduire à déterminer un résultat de cession qui est naturellement égal à la différence entre le prix de vente et la valeur de l’entité cédée dans les comptes consolidés.
Cette valeur n’apparaît pas distinctement dans les comptes du groupe. Elle se détermine par l’addition de plusieurs éléments :
- l’actif net cédé ;
- l’écart d’acquisition net ;
- l’écart de conversion inscrit dans les capitaux propres consolidés part du groupe (s’il s’agit d’une entité étrangère dont les comptes sont convertis selon la méthode du cours de clôture).
Exemple
SM a acquis 75 % des actions de F le 1er janvier N, pour un prix de 8 000 k€. Les titres ont été payés en liquidités, le jour même de l’opération. F est une société française et est consolidée par intégration globale. Lors de l’acquisition l’écart d’acquisition a été déterminé de la façon suivante :
Les écarts d’évaluation correspondent à la différence entre la valeur comptable des actifs et dettes dans les comptes individuels de l’entité consolidée et leur juste valeur déterminée au moment de la première consolidation.
La société M décide de céder sa participation dans la société F, pour un prix de 10 000 k€. Cette cession a été réalisée le 1er janvier n + 1. L’écart d’acquisition n’a pas été déprécié. Les capitaux propres consolidés de F s’élèvent à 10 387 à la date de cession.
La déconsolidation de F suite à la cession des titres va conduire à enregistrer une plus-value de 1 333 K€ dans les comptes consolidés du groupe et donc à corriger la plus-value dégagée dans les comptes individuels de SM.
AUTRES VARIATIONS
La norme IFRS 3 révisée et applicable de façon obligatoire à compter du 1er juillet 2009 a simplifié le traitement comptable des variations ultérieures d’intérêts.
En effet, les transactions avec les minoritaires après l’obtention du contrôle (variation du pourcentage sans perte de contrôle) n’affectent pas le résultat de l’entreprise, mais les montants respectifs de situation nette des majoritaires et minoritaires.
Désormais, on peut synthétiser, à l’aide du schéma ci-dessous. Le calcul du goodwill s’effectue au moment de la date de prise de contrôle une fois pour toutes. Les variations ultérieures éventuelles du pourcentage d’intérêt impactent les capitaux propres.
Diakite
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Ouattara
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