Les années 1 930, les années de guerre, les années sombres laissent la place après le conflit à une période de reconstruction et de recomposition du paysage économique et politique. C’est dans ce contexte que débute la phase de l’histoire économique durant laquelle les pays industrialisés vont connaître une expansion jamais atteinte jusque-là. Toutefois, le choc pétrolier de 1973 marque à la fois la fin de cette phase de grande prospérité et la remise en cause des mécanismes qui la sous-tendaient.
Les tenants du libéralisme, monétaristes, économistes de l’offre, reprennent les rênes du pouvoir et inspirent les politiques économiques des grandes puissances. Dans le même temps, les principales économies socialistes s’effondrent ou se convertissent elles-mêmes au capitalisme libéral dans le cadre de la mondialisation.De la reconstruction à la prospérité
• À la sortie de la Seconde Guerre mondiale, les économies des grandes puissances sont en ruine à l’exception de celle des États-Unis. La remise en ordre du commerce mondial passe donc par leur reconstruction. Pour faciliter et accélérer cette dernière, les États-Unis vont mettre en œuvre toute leur puissance à travers le plan Marshall.
• Ce plan Marshall se traduit, en final, par une aide globale de 13,2 milliards de dollars sur la période 1 948- 1 952. Grâce à l’aide reçue, les pays concernés peuvent acheter des matières premières et des machines pour l’essentiel aux États-Unis et pour une partie moindre à des pays tiers.
• L’après guerre est également marquée par la tenue de la conférence de BrettonWoods le 22 juillet 1 944. Les nouvelles règles donnent une place essentielle au dollar qui va servir d’étalon en devenant le seul équivalent de l’or (35 $ l’once d’or). Ce système de change fixe sur lequel doit veiller la nouvelle institution qu’est le FMI (Fonds Monétaire International) va favoriser l’essor considérable des échanges internationaux au cours des « Trente Glorieuses ».
• Le commerce international se développe également grâce à la diffusion du libre échange. Des négociations engagées entre les grandes puissances naît le GATT (General Agreement on Tarrifs and Trade) qui instaure le multilatéralisme à travers une série de cycles de négociations (les « round »).
• Cette phase de reconstruction et de recomposition achevée, débute alors la période des Trente Glorieuses, expression que l’on doit à l’économiste français Jean Fourastié, pour qualifier ces décennies marquées par des taux de croissance exceptionnelles, des taux de chômage inférieur à 2 % de la population active et une explosion des échanges.
Évolution de la répartition des dépenses de consommation (en %)
• Les performances économiques au cours des Trente Glorieuses sont souvent expliquées par le modèle fordiste. En effet, les économies d’échelle et les gains de productivité se répartissent de façon équilibrée entre les actionnaires, les salariés et les consommateurs.
Crise, mutations et changements de paradigme
• Il est indéniable que le choc pétrolier de 1 973 marque une n1pture dans l’histoire économique. La croissance, au cours des Trente Glorieuses, s’est grandement appuyée sur un prix bas de l’énergie. La dépense énergétique liée à la croissance forte provoquait une consommation incontrôlée, proche du gaspillage, dont les effets sur l’environnement commençaient à être condamnés.
• Le déclenchement de la crise va venir de la guerre du Kippour entre octobre et décembre 1973. En mesure de représailles, les pays membres de l’OPEP (organisation des pays exportateurs de pétrole) décide de multiplier par quatre le prix du pétrole. En 1979, survient le deuxième choc pétrolier à la suite de la guerre entre l’Iran et l’Irak.
• Toutefois, la crise pétrolière n’explique pas tout. L’effondrement du SMI a également contribué à amplifier la récession. La généralisation des taux de change flottants à partir de 1971 se traduit par un désordre monétaire qui prolonge et aggrave les difficultés économiques. L’instabilité du taux de change modifie sans cesse les conditions de la concurrence et désorganise le commerce mondial.
• De plus, le fait marquant de la période demeure la coexistence inédite de l’inflation et de la récession donnant naissance au néologisme de « stagflation ».
• Le premier choc pétrolier va donc provoquer une poussée inflationniste qui durera plus d’une décennie renforcée qu’elle a été par le second choc pétrolier. Il faudra attendre, en effet, 1984, pour que le rythme d’inflation se ralentisse.
La construction du monde économique contemporain
• À la fin des, années 1970, l’arrivée au pouvoir de Ronald Reagan aux États-Unis et de Margaret Thatcher en Angleterre reste le symbole d’une réorientation très forte des politiques économiques.
• Dès lors, une volonté politique s’est affirmée de transformer le système de financement des économies (passage à une « économie de marchés financiers »). Cette volonté s’est exprimée concrètement par des incitations (notamment fiscales) au développement des marchés financiers. Dans l’esprit de la théorie quantitative, les politiques monétaristes ont été privilégiées avec pour objectif de contrôler strictement l’évolution d’un agrégat monétaire.
• Les résultats aux États-Unis vont être spectaculaires, l’inflation supérieure à 10 % en 1980 est passée sous la barre des 4 % en 1983. Toutefois, ces résultats ne sont obtenus qu’au prix de fortes hausses de taux d’intérêt qui participent au déclenchement de la récession en 1982 (le PIB chute de plus de 2 %) et à la valorisation du dollar, autant d’éléments qui pénalisent l’emploi et les salaires.
• Enfin, la période est marquée par un très fort désengagement de l’État avec notamment de vastes programmes de privatisations qui vont jusqu’à toucher des activités relevant traditionnellement du service public.
• Le modèle libéral va se diffuser, en grande partie, par l’intermédiaire des institutions internationales pour donner naissance à ce que l’on a coutume d’appeler aujourd’hui, la mondialisation (« extension de l’économie de marché à l’ensemble de la planète »).
• Les années 1980 ont vu apparaître un véritable système financier international. L’internationalisation a été vraiment permise lorsque tous les contrôles nationaux réglementant les changes et la sortie de capitaux ont été abrogés. Aujourd’hui, du fait des décalages horaires, la finance mondiale fonctionne 24 heures sur 24.
L’Asie : un nouveau centre de gravité pour l’économie mondiale
• Les NPI ou Nouveaux Pays Industrialisés désignent les pays dont la croissance économique est à un niveau élevé, autour de 5 % par an, contre 3% au mieux dans les PDEM. Parmi les NPI d’Asie, la Corée du Sud est celui dont le processus de développement est le plus précoce et le plus abouti (entrée de la Corée du Sud dans l’OCDE en 1996).
• À partir de 1973, l’industrie lourde coréenne se développe très rapidement, avec des taux d’investissements particulièrement élevés. La compétitivité repose sur des gains de productivité élevés qui s’accompagnent de coûts salariaux relativement bas par rapport à ceux des PDEM.
• Dans les années 1980, les revendications salariales se font plus pressantes. Cette évolution induit un recentrage de l’économie coréenne sur le marché intérieur, car l’augmentation du niveau de vie permet le passage à une consommation de masse. • De 1950 à 1978, la croissance économique chinoise atteint la moyenne mondiale, et dépasse celle de nombreux pays en développement ; de 1978 à aujourd’hui, elle bat tous les records mondiaux.
• En décembre 1978, sous l’impulsion de Deng Xiaoping, le Comité central du parti communiste amorce la libéralisation économique.
• Dans la deuxième moitié des années 1980, les réformes gagnent en ampleur. En octobre 1984, le Comité central du Parti prône un système mixte où coexistent plan et marché.
• En janvier 1992, une nouvelle série de mesures est annoncée. le Comité central du Parti relance la réforme des entreprises d’État et prévoit la diversification des formes de propriété, tout en réaffirmant le rôle principal du secteur public.
• L’ouverture sur l’extérieur est également un élément essentiel des mutations subies par l’économie chinoise. Elle a un double objectif : attirer les capitaux étrangers et promouvoir les échanges extérieurs afin d’accélérer la croissance et la modernisation de l’économie.
Les mécanismes de la reconstruction après 1 945.
L’enjeu essentiel pour les économies européennes en 1 945 est de se reconstruire mais la question reste posée de savoir si la reconstruction notamment doit se faire à l’identique. La réponse dépend évidemment du changement de contexte à l’issue de la Seconde Guerre mondiale. À ce titre, deux changements importants ont eu lieu.
En premier lieu, l’État, depuis les années 1 930 et comme toujours lors d’une période de reconstruction, occupe une place prépondérante. En second lieu, sur le plan international, les États-Unis dominent l’économie mondiale. Au regard de ces évolutions, on peut se demander si les mécanismes de reconstruction ont donné naissance à un nouveau cadre économique et social ?
La reconstruction après le conflit mondial est orchestrée et facilitée par la puissance américaine à travers notamment le plan Marshall qui permet aux économies européennes de se redresser rapidement. Cette influence des États-Unis se fait également ressentir avec la mise en œuvre de nouvelles institutions qui semblent donner à la reconstruction une forte coloration libérale (GATT, SMI) dans la mesure où l’objectif est de favoriser les échanges.
Toutefois, il semble difficile de considérer que les États-Unis imposent un modèle libéral. En effet, les Trente Glorieuses qui vont suivre sont également marquées par la domination des idées keynésiennes et la mise en place de politiques budgétaires actives mais aussi par la montée en puissance de l’État Providence qui se traduit par la construction d’un nouveau cadre social sensiblement éloigné des conceptions libérales quant à ses fondements.
Très bonne synthèse de l’histoire économique de l’après guerre mondiale. De la reconstruction des économies à la transition entre économie socialiste à l’économie de de marché.