Problèmes monétaires et financiers internationaux

Au cours des années 1 990, de l’Asie à la Russie en passant par l’Amérique du Sud et l’Amérique centrale, des perturbations majeures d’ordres monétaires et financiers ont déstabilisé l’ensemble des économies mondiales. Toutefois, la crise dite des «subprimes » qui se déclenche à l’automne 2008 semble devoir être considérée comme un phénomène d’une tout autre ampleur puisqu’elle a fait entrer l’économie mondiale dans une récession comme il n’en avait plus été observée depuis la crise de 1 929. Ces crises posent de nombreuses interrogations quant à la remise en cause du système monétaire et financier international. La référence aux accords de BrettonWoods et au dernier cadre stable qu’ils offraient à l’économie mondiale est souvent évoquée aujourd’hui .

Problèmes monétaires et financiers internationaux

Il semble donc pertinent de bien comprendre, tout d’abord, comment ]es économies ont abandonné le système monétaire international issu de ces accords pour adopter de nouvelles règles de fonctionnement. Cela nous amènera, ainsi, à apprécier les perspectives de reconstruction d’un nouveau système monétaire et financier international.

L’instabilité monétaire et financière internationale

Pour éviter que ne se reproduisent les dérives monétaires de l’entre deux guerres mondiales et la multiplication des « dévaluations compétitives », Les accords de BrettonWoods vont être signés en 1 944 afin de mettre en place un cadre monétaire stable à l’échelle internationale. Ces accords comprenaient, en premier lieu, la mise en place d’un système de taux de change fixe.

Les accords de BrettonWoods scellent également La création du Fonds monétaire international, le FMI. Celui-ci est le garant de la stabilité des changes. Dès la fin des années 1950, le système de changes fixes va connaître des dysfonctionnements puisque c’est à cette période que la quantité de dollars en circulation dans l’économie mondiale va s’accroître, causant progressivement la perte du système mise en place en 1 944. En effet, à partir de la fin des années 1950, les excédents commerciaux américains se réduisent considérablement et l’Europe, d’une part, et le Japon, d’autre part, commencent à exporter vers les États Unis.

Le rapport entre la quantité de dollars en circulation et le stock d’or mondial s’est ainsi considérablement modifié. Face à cette situation et devant le risque, notamment, de voir les autres pays demander la conversion de leur dollar en or, le président Nixon décide unilatéralement, le 15 août 1971, la suspension de la convertibilité entre les deux étalons.

Si les années 1 970 ont été la décennie de la transformation des systèmes de change, les années 1 980 ont vu apparaître un véritable système financier international.

Les marchés financiers ont pour vocation d’assurer la rencontre de l’épargne longue et des besoins de financement. En ce sens, ils ont permis aux États de financer leurs déficits sans avoir recours au crédit et donc à la création monétaire, source d’inflation. Toutefois, la puissance des investisseurs institutionnels internationaux fait qu’ils constituent une contrainte pour de nombreux États et une menace en termes de déstabilisation des marchés.

Toutefois, la principale critique à l’égard du développement des marchés financiers reste qu’ils se sont écartés de leur fonction première et aurait favorisé la montée d’une spéculation à l’échelle internationale.

Les crises monétaires et financières internationales

Les crises des années 1990 ont touché plus particulièrement les pays en développement ou en transition. La croissance de ces pays nécessitait bien évidemment un financement qui ne peut être assuré uniquement par l’épargne nationale. En consé­quence, le recours à l’endettement, en faisant appel aux capitaux internationaux, s’avérait indispensable.

L’endettement est supportable tant que la croissance génère suffisamment de ressources pour y faire face. Or, le développement de nombreux pays émergents se construit autour du dynamisme des exportations ce qui va faire jouer un rôle central au taux de change. Si la devise nationale décroche par rapport au dollar alors le poids de la dette n’est plus supportable, la Thailande s’est retrouvée, de cette manière, en situation de cessation de paiements. La fuite des capitaux s’est alors accélérée, limitant encore plus les possibilités de financement.

La crise des « subprimes » dont les effets se font ressentir au cours de l’automne 2008 relève à la fois des mêmes mécanismes mais donne naissance également à de nouveaux phénomènes.

En effet, après l’éclatement de la bulle internet, les autorités monétaires américaines ont, au début des années 2000, adopté une politique monétaire de faibles taux d’intérêt. Cette politique a contribué à stimuler les crédits immobiliers favorisant la formation d’une nouvelle bulle avec progressivement une surévaluation de la valeur des actifs immobiliers.

Cette bulle s’est d’autant plus développée qu’une première innovation est apparue avec les « subprimes », crédit hypothécaire à taux élevé mais a priori supportable pour le débiteur puisque les prix dans l’immobilier continuaient à s’apprécier.

L’éclatement de la bulle immobilière va donc entraîner la chute des prix des actifs et avec elle celle de la valeur des hypothèques. Le système bancaire doit faire face, dans un premier temps, à une crise de solvabilité qui se transforme rapidement en une crise de liquidité puisque faute d’être capable d’identifier clairement les risques, les banques ne prêtent plus. Les premières faillites des établissements bancaires provoquent alors une grave crise boursière.

Lors des crises des pays en développement, les interventions du fonds monétaire international ont un effet pervers à travers le phénomène dit « d’aléa moral ». En effet, les investisseurs internationaux savent qu’en cas de difficultés le FMI vient soutenir les pays en cessation de paiements pour leur permettre d’honorer leurs dettes. En conséquence, certains placements jugés risqués à l’origine, ne le sont plus en raison de la garantie apportée par les aides provenant de l’institution internationale qui apparaît, alors, comme le prêteur en dernier ressort.

Cependant, comme pour le FMI, les autorités se trouvent face à un dilemme à savoir que des interventions systématiques en tant que prêteur en dernier ressort si elles empêchent la réalisation du risque systémique encouragent des comportements irresponsables de la part des agents.

La recherche d’un nouveau système monétaire et financier international

Les crises financières ont mis en évidence un certain nombre de dysfonctionnements auxquels il s’agirait de remédier, quelques pistes peuvent être évoquées :

  • organiser et de contrôler les marchés de gré à gré ;
  • définir des normes précisant la nature des produits financiers destinés à être titrisés ;
  • mieux contrôler les prêts immobiliers (contraindre les banques à vérifier la solvabilité du client, limiter la durée des prêts immobiliers).

Revoir le fonctionnement des mécanismes est une chose, repenser le jeu des acteurs défaillants en est une autre. De nombreux agents sont notamment présentés comme responsables à des degrés divers de la crise :

  • les agences de notation accusées de ne pas avoir vu venir la crise en continuant à surévaluer des actifs toxiques ;
  • les hedgefunds et paradis fiscaux. Les deux tiers des fonds spéculatifs résident dans des paradis fiscaux ;
  • les banques de dépôts apparaissent également comme fautives dans le déclenchement de la crise en utilisant leurs fonds propres afin de financer des projets immobiliers à la rentabilité très incertaine.

Il importe également de revoir les pratiques des sociétés financières en matière de rémunération qui, au-delà de la perte de sens du niveau atteint par certains salaires, primes ou bonus contribuent à inciter les acteurs à des prises de risques excessives. Quelques pistes de réflexion sont aujourd’hui présentées :

  • repenser la rémunération du trader avec une partie fixe plus importante ;
  • une part variable qui intègre les gains réels réalisés ;
  • des versements ne pouvant s’effectuer que lorsque l’opération est clôturée ;
  • une rémunération sous forme de titres qui sensibilise beaucoup plus le trader à l’évolution des cours boursiers ;
  • une gouvernance plus efficace avec une présentation des principes de rémunération des salariés au cours du conseil d’administration.

Repenser la gouvernance mondiale

Une plus grande stabilité du système monétaire et financier international passerait par de nouvelles politiques de change. Plusieurs pistes ont déjà été explorées :

  • les systèmes de caisse d’émission ou de conseil monétaire (currencyboard). Il s’agit, ici, pour une économie de fixer constitutionnellement la parité de sa monnaie dans une devise étrangère (généralement le dollar). En conséquence, le pays doit disposer d’une quantité de devises en contrepartie de l’émission de sa propre monnaie.
  • les processus de dollarisation. Il s’agit d’adopter définitivement la devise américaine comme moyen de paiement dans le pays en remplacement de la monnaie nationale.
  • les systèmes d’ancrage plus ou moins stricts à un panier de monnaie. L’euro, même si ce n’est pas le cas encore actuellement, devrait progressivement occuper une place importante dans ces paniers de monnaie. On parviendrait progressivement, alors, à un système bipolaire avec deux devises dominantes l’euro et le dollar.

Il semble indispensable également de favoriser la coopération internationale à l’image de ce qui a été fait avec le sommet du G20 en avril 2009. La question de la gouvernance passe pour finir par la place centrale que pourrait occuper le FMI à l’avenir. Il serait toutefois nécessaire de faire disparaître trois dysfonctionnements :

  • la répartition des pouvoirs au sein de ses organes de direction n’était plus repré­sentative. Les modifications des droits de vote décidées en 2010 ont certes élevé le nombre de voix pour la Chine mais ne reflètent pas la réalité de l’économie mondiale (plan de relance de la Chine supérieur à celui du Japon) ;
  • une absence de marge de manœuvre en raison de sa dépendance à l’égard de Washington ;
  • un manque de moyens pour faire face à une profonde crise internationale.

Application : Le système de BrettonWoods, une référence ?

Corrigé

• Pourquoi s’interroger aujourd’hui sur un système monétaire fondé en 1 945 et qui ne fonctionne plus depuis bientôt 30 ans ? Au-delà de la curiosité intellectuelle, la référence fréquente à celui ci de la part de nombreux auteurs ou de responsables politiques fait apparaître une certaine  » nostalgie » de BrettonWoods. Il représente, en effet, la stabilité et correspond aux trente années glorieuses qu’a connu l’économie mondiale.

• Toutefois, ce système monétaire n’a pas toujours comporté que des avantages pour les économies. De nombreuses crises de changes ont eu lieu, au cours de ces trente années d’existence et les contraintes qu’il faisait peser sur les politiques économiques nationales étaient loin d’être négligeables.

• De plus, le système de BrettonWoods correspondait à un environnement financier spécifique à l’époque. À la suite de la libéralisation des mouvements de capitaux dans les années 80, on peut douter de la viabilité d’un système de taux de change fixes. Rien ne vient confirmer d’ailleurs la supériorité d’un tel système par rapport aux mécanismes de changes flottants. Ces derniers, notamment, contribuent à des ajustements plus souples et moins contraignants pour les autorités nationales.

• La référence à BrettonWoods se justifie, en revanche, dans la mesure où il semble indispensable, maintenant, de reconstruire un nouveau et véritable système monétaire, bien sûr, mais également et peut être surtout financier, le fonctionnement des marchés de capitaux à l’échelle internationale étant source de nombreux dysfonctionnements. Dans ce sens, les accords de BrettonWoods restent le dernier exemple de l’efficacité d’une collaboration internationale qui apparaît comme indispensable, aujourd’hui.

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