L’audit légal des comptes a pour objectif la vérification par un ou plusieurs professionnels indépendants, les commissaires aux comptes, de la régularité, de la sincérité et de l’image fidèle des comptes annuels et/ou consolidés. Il concerne certaines sociétés commerciales et certaines sociétés non commerciales, entreprises ou groupements de par leur activité ou leur taille. La mission d’audit légal du commissaire aux comptes a pour objectif la formulation d’une opinion après la mise en œuvre d’un certain nombre de travaux . Cette opinion consiste à donner une assurance raisonnable que les comptes, pris dans leur ensemble, ne comportent pas d’anomalies significatives.
Ce chapitre présente dans les deux premières parties la mission légale et les autres missions du commissaire aux comptes. La troisième partie est consacrée à la démarche d’audit dans son ensemble et au développement de certains aspects de la mission de l’auditeur (évaluation du contrôle interne, collecte d’éléments probants et contrôles par sondages).
Remarque : Les éléments généraux concernant la fonction de commissaire aux comptes et les entités soumises au contrôle légal des comptes sont traités dans « L’organisation de la profession comptable ».
La mission légale du commissaire aux comptes
La mission légale du commissaire aux comptes se scinde en deux dimensions :
- une mission générale liée à l’audit et à l’accomplissement de vérifications spécifiques ;
- des interventions et missions particulières définies par le législateur à l’occasion d’opérations ou événements donnés de la vie de l’entreprise.
A. La mission générale du commissaire aux comptes
La mission générale du commissaire aux comptes est définie par les articles L. 823-9 à L. 823-12 du Code de commerce. Les modalités d’exercice de sa mission sont stipulées, quant à elles, aux articles L. 823-13 à L. 823-18.
1. La mission d’audit
a. L’objectif de la mission d’audit
La mission d’audit a pour objectif la certification des comptes annuels et, le cas échéant, des comptes consolidés de l’entité contrôlée. « Les commissaires aux comptes certifient, en justifiant de leurs appréciations, que les comptes annuels sont réguliers et sincères et donnent une image fidèle du résultat des opérations de l’exercice écoulé ainsi que de la situation financière et du patrimoine de la personne ou de l’entité à la fin de cet exercice. Lorsqu’une personne ou une entité établit des comptes consolidés, les commissaires aux comptes certifient, en justifiant de leurs appréciations, que les comptes consolidés sont réguliers et sincères et donnent une image fidèle du patrimoine, de la situation financière ainsi que du résultat de l’ensemble constitué par les personnes et entités comprises dans la consolidation. […] » (Code de commerce – article L. 823-9).
Le rapport d’opinion constitué alors est appelé « rapport général » pour les comptes annuels et « rapport sur les comptes consolidés » pour les comptes consolidés.
b. Le caractère permanent de la mission d’audit
Le commissaire aux comptes a une mission permanente : – de vérification des valeurs et documents comptables de l’entité contrôlée ; – de contrôle de la conformité de sa comptabilité aux règles en vigueur. Cela ne signifie pas qu’il doive être présent en permanence dans l’entité contrôlée mais qu’il peut, à toute période de l’année, opérer les vérifications et contrôles qu’il juge opportuns et se faire communiquer les pièces qu’il estime utiles à l’exercice de sa mission (Code de commerce – articles L. 823-10 et L. 823-13).
2. Les vérifications spécifiques
Les vérifications spécifiques sont des travaux complémentaires de contrôle prévus par la loi qui peuvent être communs à toutes les sociétés ou concerner seulement les sociétés par actions. La liste suivante n’est pas exhaustive mais décrit les principales vérifications à mettre en œuvre par le commissaire aux comptes.
a. Vérifications spécifiques communes à toutes les sociétés
Elles portent notamment sur les points suivants :
- respect de l’égalité entre les actionnaires (Code de commerce – article L. 823-11) ;
- sincérité et concordance avec les comptes annuels des informations données dans le rapport de gestion du conseil d’administration, du directoire ou de tout organe de direction et dans les documents adressés aux actionnaires ou associés sur la situation financière et les comptes annuels (Code de commerce – article L. 823- 10) ;
- sincérité et concordance avec les comptes consolidés des informations données dans le rapport sur la gestion du groupe (Code de commerce – article L. 823-10) ;
- examen limité des documents liés à la prévention des difficultés des entreprises (Code de commerce – articles L. 232-3 et 232-4) ;
- contrôle des conventions réglementées (Code de commerce – selon le type de société : article L. 225-40 pour la SA) donnant lieu à l’émission du rapport spécial (rapport d’information sur les conventions directes ou indirectes entre une entité et certains de ses membres).
b. Vérifications spécifiques relatives aux sociétés par actions
Elles concernent en particulier :
- la certification du montant global des rémunérations des cinq ou dix personnes les mieux rémunérées selon que l’effectif excède ou non deux cents salariés (Code de commerce – article L. 225-115-4°) ;
l’examen limité des documents du premier semestre (Code de commerce – article L. 232-7-3).
3. Les conséquences des erreurs ou inexactitudes relevées au cours de la mission
Le commissaire aux comptes a un devoir de communication des inexactitudes ou irrégularités découvertes lors de l’exercice de sa mission et qui présentent un caractère significatif que ce soit lors de sa mission d’audit ou au cours de ses vérifications spécifiques.
a. Définition d’une irrégularité et d’une exactitude
Une irrégularité signifie la non-conformité aux textes légaux ou réglementaires, ou aux principes édictés par le référentiel comptable applicable, ou aux dispositions des statuts, ou aux décisions de l’assemblée générale. Une irrégularité peut résulter d’une omission ou d’un acte involontaire ou volontaire. Elle peut, ou non, avoir une incidence sur les comptes.
Exemple:
- informations manquantes dans le rapport de gestion ;
- défaut d’établissement de l’attestation de l’état des rémunérations versées aux personnes les mieux rémunérées ou des documents liés à la prévention des difficultés des entreprises.
Une inexactitude est la traduction comptable ou la présentation d’un fait non conforme à la réalité.
Exemple:
- informations erronées données dans le rapport de gestion ;
- calculs arithmétiques ou imputation d’écriture dans les comptes incorrects.
b. Communication à la direction
Les irrégularités et inexactitudes découvertes doivent d’abord être communiquées dans les meilleurs délais à la connaissance de l’organe collégial chargé de l’administration et, le cas échéant, de l’organe chargé de la direction de l’entreprise concernée (Code de commerce – article L. 823-16).
c. Communication à l’assemblée générale
« Les commissaires aux comptes signalent à la plus prochaine assemblée générale ou réunion de l’organe compétent les irrégularités et inexactitudes relevées par eux au cours de l’accomplissement de leur mission. » (Code de commerce – article L. 823- 12).
d. Révélation des faits délictueux au procureur de la République
Le Code de commerce (article L. 823-12) impose en outre au commissaire aux comptes la révélation des faits délictueux au procureur de la République. Les faits concernés doivent remplir trois critères :
- caractère délictueux : sont concernées toutes les infractions relevées par le commissaire aux comptes dans l’exercice de sa mission, quelles que soient les personnes de l’entreprise en cause (infractions au Code de commerce ou autre texte de base applicable à l’entité contrôlée ou à d’autres textes et ayant une incidence significative sur les comptes) ;
- caractère significatif : le fait délictueux modifie sensiblement la présentation de la situation financière, du patrimoine ou du résultat, ou il peut porter préjudice à l’entreprise ou à un tiers ;
- caractère délibéré : ce critère résulte de la conscience que pouvait avoir l’auteur de l’infraction de ne pas respecter la réglementation en vigueur.
Exemple:
- compte courant débiteur d’un administrateur ;
- non-tenue délibérée de l’assemblée générale ordinaire dans le délai de 6 mois suivant la date de clôture.
B. Les missions particulières du commissaire aux comptes
Des interventions et missions particulières sont définies par le législateur à l’occasion d’opérations ou événements particuliers de la vie de l’entreprise.
1. Missions particulières liées à des opérations décidées par l’entité
Le commissaire aux comptes intervient notamment lors des opérations suivantes afférentes à la vie des sociétés :
- libération d’actions par compensation de créances : certification de l’arrêté des comptes et des libérations d’actions (Code de commerce – article L. 225-146) ;
- suppression du droit préférentiel de souscription (Code de commerce – article L. 225-135) ;
- émission de valeurs mobilières donnant accès au capital : obligations convertibles ou échangeables contre des actions, obligations avec bons de souscription d’actions, etc. (Code de commerce – article L. 228-92) ;
- réduction de capital (Code de commerce – article L. 225-204) ;
- distribution d’acomptes sur dividendes (Code de commerce – article L. 232-12) ;
- paiement du dividende ou d’acomptes sur dividendes en actions (Code de commerce – article L. 232-19) ;
- transformation de la société (Code de commerce – article L. 225-244 pour la société anonyme et L. 223-43 pour la SARL).
2. Missions particulières liées à des événements survenant dans
la société
Le commissaire aux comptes intervient également à l’occasion de certains événements liés à la vie des sociétés, parmi lesquels on peut citer :
- faits de nature à compromettre la continuité d’exploitation : le commissaire aux comptes doit alors déclencher la procédure d’alerte (Code de commerce – article L. 234-1 et 2) ;
- faits délictueux significatifs et délibérés : révélation au procureur de la République (Code de commerce – article L. 823-12) ;
- convocation de l’assemblée générale en cas de carence des organes sociaux (Code de commerce – article L. 225-103) ;
- visa des déclarations de créances en cas de procédures de sauvegarde et de redressement judiciaire (Code de commerce – article L. 622-25 et L. 631-19).
Les autres missions du commissaire aux comptes
Les autres missions du commissaire aux comptes concernent :
- des interventions définies par convention ;
- des missions spécifiques.
A. Interventions définies par convention
Les interventions définies par convention sont effectuées par le commissaire aux comptes à la demande des dirigeants, indépendamment de tout contexte légal ou réglementaire. On peut citer notamment les missions suivantes.
1. Comptes prévisionnels
Le commissaire aux comptes peut être amené à examiner les comptes prévisionnels (bilan, compte de résultat, notes annexes et plan de financement) d’une société à la demande des dirigeants en dehors des cas prévus par la loi.
Exemple:
- demande émanant d’un banquier ou d’actionnaires ;
- établissement spontané.
Remarque: Le rapport établi par le commissaire aux comptes dans ce cadre porte sur :
- les hypothèses retenues pour l’établissement des comptes prévisionnels ;
- la traduction chiffrée des hypothèses retenues ;
- le respect des principes d’établissement et de présentation applicables aux comptes prévision nels ;
- la conformité des méthodes comptables retenues avec celles appliquées pour l’établissement des derniers comptes arrêtés par l’entité.
2. Comptes pro forma
Le commissaire aux comptes d’une entité peut, à la demande des dirigeants, émettre un rapport d’examen de comptes pro forma. Les comptes pro forma sont établis à partir de comptes annuels, consolidés ou intermédiaires ayant déjà fait l’objet d’un audit ou d’un examen limité.
Exemple:
- changement de périmètre suite à des opérations de fusion, acquisition, OPA, OPE, etc. ;
- demande émanant d’un banquier ou d’actionnaires.
3. Attestations particulières
Le commissaire aux comptes d’une entité peut, à la demande de son client, délivrer une attestation relative à des informations diverses ponctuelles de nature comptable et financière.
Exemple:
- attestation dans le cadre de la participation des salariés relative au montant du bénéfice net et des capitaux propres de l’entité contrôlée ;
- certification de factures à la demande d’une autorité publique étrangère à l’occasion d’un marché ;
- attestation relative à certains éléments comptables ou fi nanciers à la demande d’une banque ou d’un organisme public préalablement à l’octroi d’un prêt ou d’une subvention.
B. Interventions spécifiques
Les opérations de fusion, scission et apports partiels d’actif nécessitent l’intervention d’un commissaire à la fusion et aux apports. Le commissaire à la fusion est choisi sur la liste des commissaires aux comptes ou parmi les experts inscrits sur une des listes établies par les cours et tribunaux. Il est interdit à un commissaire aux comptes d’intervenir pour une mission de commissaire aux apports ou à la fusion d’une entité dont il certifie les comptes ou pour la personne qui la contrôle ou qui sont contrôlées par celle-ci (Code de déontologie – article 10).
Exemple:
Le commissaire aux comptes d’une société X ne peut effectuer une mission de commissaire aux apports relatif à un bien appartenant à une filiale Y de la société X et apporté à une filiale de Y
La mission du commissaire aux apports consiste à :
- apprécier la valeur des apports en nature ;
- vérifier que le montant net de l’actif apporté par la ou les sociétés absorbées est au moins égal à l’augmentation de capital de la société absorbante ;
- apprécier les avantages particuliers stipulés lors de l’opération.
Remarque: La mission du commissaire aux apports est en général effectuée par le commissaire à la fusion. Cependant, en l’absence de commissaire à la fusion (cas de fusion à 100 % par exemple), un commissaire aux apports doit être nommé.
2. Commissariat à la fusion
La mission du commissaire à la fusion porte sur :
- la vérification de la pertinence des valeurs relatives attribuées aux actions des sociétés participant à l’opération ;
- l’appréciation du caractère équitable du rapport d’échange proposé.
La démarche d’audit et sa mise en œuvre
A. Démarche d’audit
1. Principes généraux
La démarche du commissaire aux comptes résulte des limites de l’audit qui ne consiste pas en une analyse exhaustive de l’ensemble des transactions réalisées par l’entité contrôlée mais en une approche basée sur les risques.
Les limites de l’audit résultent notamment :
- des limites inhérentes au contrôle interne (voir § B.1. de la présente partie) ;
- du fait que la plupart des éléments collectés au cours de la mission conduisent davantage à des présomptions qu’à des certitudes (voir § B.2. de la présente partie) ;
- de l’utilisation des techniques de sondages (voir § B.3 de la présente partie).
2. Risque d’audit et étendue des travaux
La norme d’exercice professionnel NEP 200 « Principes applicables à l’audit des comptes mis en œuvre dans le cadre de la certification des comptes » définit le risque d’audit et ses composantes.
a. Risque d’audit
Le risque d’audit est le risque que le commissaire aux comptes exprime une opinion différente de celle qu’il aurait émise s’il avait identifié toutes les anomalies significatives dans les comptes. Le risque d’audit comprend deux composantes :
- le risque d’anomalies significatives dans les comptes ;
- le risque de non-détection de ces anomalies.
b. Risque d’anomalies significatives dans les comptes
Le risque d’anomalies significatives dans les comptes est propre à l’entité contrôlée. Il existe indépendamment de l’audit des comptes. Il se subdivise lui-même en deux risques :
- le risque inhérent à la possibilité que, sans tenir compte du contrôle interne de l’entité, une anomalie significative se produise dans les comptes ;
Exemple:
- risque lié à l’activité de l’entreprise (négoce, production industrielle, banque, etc.) ;
- risque lié à la répartition du capital (actionnariat familial, société cotée, filiale à 100 %, etc.) ;
- risque lié au personnel (formation, rémunération, taux de rotation, etc.).
- le risque de contrôle, correspondant au risque qu’une anomalie significative ne soit ni prévenue ni détectée par le contrôle interne de l’entité et donc non corrigée en temps voulu.
Exemple:
- risque lié à la conception d’un système de traitement : facturation clients, paie, etc. ;
- risque lié au fonctionnement des systèmes : contrôles prévus non exécutés, anomalies de traitement informatique, etc.
c. Risque de non-détection
Le risque de non-détection est propre à la mission d’audit. Il correspond au risque que le commissaire aux comptes ne parvienne pas à détecter une anomalie significative.
Le commissaire aux comptes doit réduire le risque d’audit à un niveau suffisamment faible pour obtenir l’assurance recherchée nécessaire à la certification des comptes.
d. Lien entre les types de risques
Plus le risque d’anomalies significatives est élevé, plus le commissaire aux comptes met en œuvre des procédures d’audit complémentaires afin de réduire le risque de non-détection.
3. Principales phases de la mission d’audit
La mise en œuvre de l’approche par les risques définie ci-dessus se traduit par les deux phases suivantes issues des nouvelles normes d’exercice professionnel (NEP) des commissaires aux comptes :
- prise de connaissance de l’entité et évaluation du risque d’anomalies significatives dans les comptes ;
- procédures d’audit en réponse à l’évaluation des risques.
a. Prise de connaissance de l’entité et évaluation du risque d’anomalies significatives dans les comptes (NEP 315)
La connaissance de l’entité contrôlée permet au commissaire aux comptes de disposer d’un cadre de référence dans lequel il planifie son audit. Cette prise de connaissance concerne notamment :
- le secteur d’activité de l’entreprise et son environnement réglementaire ;
les caractéristiques de l’entité : composition du capital, catégories d’opérations, organisation, financement, etc. ;
- les objectifs de l’entreprise et stratégies mises en œuvre pour les atteindre ;
- la mesure et l’analyse de ses indicateurs de performance financière ;
- les éléments du contrôle interne pertinents pour l’audit.
Exemple:
- environnement de contrôle interne (comportement de la direction, degré de sensibilité et actions menées en matière de contrôle interne) ;
- procédures de contrôle interne mises en place ;
- système d’information relatif à l’élaboration de l’information financière.
La prise de connaissance de l’entité contrôlée doit permettre au commissaire aux comptes d’identifier les risques d’anomalies significatives :
- au niveau des comptes pris dans leur ensemble ;
- au niveau des assertions (critères dont la réalisation conditionne la régularité, la sincérité et l’image fidèle des comptes), pour les catégories d’opérations, les soldes de comptes et les informations fournies dans l’annexe.
b. Procédures d’audit en réponse à l’évaluation des risques (NEP 330)
En fonction des conclusions de l’étape précédente, le commissaire aux comptes adapte son approche générale et conçoit et met en œuvre des procédures d’audit lui permettant de fonder son opinion sur les comptes.
Les procédures d’audit sont l’ensemble des travaux réalisés au cours de l’audit afin de collecter les éléments permettant d’aboutir à des conclusions à partir desquelles le commissaire aux comptes fonde son opinion.
Ces procédures d’audit comportent deux types de contrôles :
- les tests de procédures qui permettent de collecter des éléments en vue d’apprécier l’efficacité des contrôles conçus et mis en œuvre par l’entité pour prévenir, détecter ou corriger les anomalies significatives au niveau des assertions ;
Exemple:
- demandes d’information ;
- réexécution de certains contrôles réalisés par l’entité (contrôle de l’exactitude des prix facturés, contrôle de l’établissement et de l’exactitude d’états de rapprochement bancaires, etc.).
- les contrôles de substance qui sont les procédures mises en œuvre pour détecter les anomalies significatives au niveau des assertions. Elles incluent les tests de détail (qui consistent à contrôler des éléments individuels) et les procédures analytiques (voir § B.2. de la présente partie).
B. Mise en œuvre de la démarche d’audit
Nous aborderons trois points liés à la mise en œuvre de la démarche de l’auditeur :
- le contrôle interne ;
- la collecte d’éléments probants ;
- les contrôles par sondages.
1. Le contrôle interne
a. Définition
L’IFAC (International Federation of Accountants) définit le système de contrôle interne comme l’ensemble des politiques et procédures mises en œuvre par la direction d’une entité en vue d’assurer, dans la mesure du possible, la gestion rigoureuse et efficace de ses activités (norme 400 « Évaluation du risque et contrôle interne »).
Il résulte de cette définition que :
- le contrôle interne est plus préventif que répressif, le terme de contrôle étant synonyme de maîtrise ;
- le contrôle interne est un ensemble de moyens mis en place dans une entreprise et faisant partie intégrante de son organisation ;
- la direction de l’entreprise est responsable de la définition, de la mise en œuvre et de la supervision des moyens pour atteindre un certain nombre d’objectifs dans ce cadre.
b. Objectifs
Les objectifs du contrôle interne sont d’assurer :
- la conformité aux lois et règlements,
- le respect des instructions et orientations fixées par la direction,
- le bon fonctionnement des processus internes de la société (opérationnels, industriels, commerciaux et financiers), notamment ceux concourant à la sauvegarde des actifs (protection du patrimoine de l’entreprise),
- la fiabilité des informations financières, et de façon générale de contribuer à la maîtrise des activités, l’efficacité des opérations et l’utilisation efficiente des ressources de l’entreprise.
c. Principes
L’Autorité des Marchés Financiers (AMF) a défini, dans un document intitulé « Le dispositif de contrôle interne : cadre de référence » (octobre 2006), les cinq principes fondamentaux du contrôle interne. Le dispositif de contrôle interne, adapté aux caractéristiques de chaque entité, doit en effet prévoir :
- une organisation comportant une définition claire des responsabilités, disposant des ressources et des compétences adéquates et s’appuyant sur des procédures, des systèmes d’information, des outils et des pratiques appropriées ;
- la diffusion en interne d’informations pertinentes et fiables, dont la connaissance permet à chacun d’exercer ses responsabilités ;
- un système visant à recenser et analyser les principaux risques identifiables au regard des objectifs de la société et à s’assurer de l’existence de procédures de gestion de ces risques ;
- des activités de contrôle proportionnées aux enjeux propres à chaque processus et conçues pour réduire les risques susceptibles d’affecter la réalisation des objectifs de la société ;
- une surveillance permanente du dispositif de contrôle interne ainsi qu’un examen régulier de son fonctionnement. Cette surveillance, qui peut utilement s’appuyer sur la fonction d’audit interne de la société lorsqu’elle existe, peut conduire à l’adaptation de ce dispositif de contrôle interne.
Exemple:
Principes et points clés des processus comptables liés au cycle achats/fournisseurs et assimilés
- Le processus achats est organisé et formalisé dans le cadre de procédures applicables par tous les acteurs concernés.
- Il existe une séparation des fonctions de passation et d’autorisation des commandes, de réception, d’enregistrement comptable et de règlement des fournisseurs.
- Les achats importants font l’objet d’une commande détaillée, validée par une personne autorisée.
- Il existe un suivi et un rapprochement entre les bons de commande, les bons de réception et les factures (quantités, prix, conditions de paiement). Les anomalies éventuelles font l’objet d’une analyse et d’un suivi.
- Il existe un dispositif permettant d’éviter le double enregistrement et le paiement des factures fournisseurs.
- Il existe un contrôle des avances sur factures fournisseurs.
- Il existe un suivi des réceptions refusées/litiges et un contrôle de la comptabilisation des avoirs fournisseurs correspondants ou des rabais, remises et ristournes.
- La gestion des règlements fournisseurs fait l’objet de contrôles par une personne indépendante et autorisée.
- Les comptes fournisseurs font l’objet d’un examen et d’une justification périodique (exhaustivité, exactitude).
- Il existe une procédure permettant de s’assurer que les produits et les charges ont été enregistrés sur la bonne période.
- Il existe un dispositif permettant d’enregistrer les provisions pour factures non parvenues ou les charges payées d’avance de manière exhaustive et exacte.
d. Limites
Le dispositif de contrôle interne ne peut fournir une garantie absolue quant à l’atteinte des objectifs définis. Les limites du contrôle interne résultent notamment :
- des incertitudes du monde extérieur ;
- de l’exercice de la faculté de jugement du commissaire aux comptes ;
- de dysfonctionnements en raison de défaillances humaines ou d’erreurs ;
- du rapport coût/bénéfice qui conduit à ne pas développer des systèmes de contrôle interne inutilement coûteux, quitte à accepter un certain niveau de risque.
2. La collecte d’éléments probants
Le commissaire aux comptes collecte tout au long de sa mission d’audit des comptes des éléments qui lui permettent d’aboutir à des conclusions à partir desquelles il fonde son opinion sur les comptes. La norme d’exercice professionnel NEP 500 « Caractère probant des éléments collectés » a pour objectif de définir ce qu’est un élément probant et les techniques de contrôle afférentes à la collecte de tels éléments.
a. Définition des éléments collectés et caractère probant
Les éléments collectés par le commissaire aux comptes comprennent les informations recueillies :
- au cours de l’audit ;
- au cours des audits portant sur les exercices précédents et lors d’autres interventions ;
- dans le cadre de l’acceptation ou du maintien de la mission. Les éléments collectés doivent être suffisants et appropriés pour permettre au commissaire aux comptes de fonder son opinion sur les comptes :
- le caractère approprié est fonction de la fiabilité et de la pertinence des éléments collectés ;
- le caractère suffisant s’apprécie par rapport à la quantité d’éléments collectés.
La fiabilité des éléments collectés varie selon leur origine, leur nature et les circonstances dans lesquelles ils ont été recueillis.
Exemple:
- les éléments collectés d’origine externe sont plus fi ables que ceux d’origine interne. Ainsi, lorsque le commissaire aux comptes utilise des informations produites par l’entité pour mettre en œuvre des procédures d’audit, il collecte des éléments concernant leur exactitude et leur exhaustivité ;
- les éléments collectés d’origine interne sont d’autant plus fi ables que le contrôle interne est efficace ;
- les éléments probants obtenus directement par le commissaire aux comptes, par exemple une observation physique, sont plus fi ables que ceux obtenus par des demandes d’information ;
- les éléments collectés sont plus fi ables lorsqu’ils sont étayés par des documents ;
- les éléments collectés constitués par des documents originaux sont plus fi ables que ceux constitués de copies.
b. Objectifs de collecte des éléments probants
La collecte d’éléments probants doit permettre au commissaire aux comptes d’obtenir les éléments de preuve ou les présomptions quant au respect des assertions suivantes :
- réalité : les opérations et événements qui ont été enregistrés se sont produits et se rapportent à l’entité ;
- exhaustivité : toutes les opérations et tous les événements qui auraient dû être enregistrés sont enregistrés ;
- mesure/évaluation : les montants et autres données relatives aux opérations sont correctement enregistrés, les actifs et passifs sont inscrits dans les comptes pour les montants appropriés ;
- séparation des exercices : les opérations et les événements sont enregistrés dans la bonne période ;
- classification : les opérations et tous les événements ont été enregistrés dans les comptes adéquats ;
- existence : des actifs et des passifs ;
- droits et obligations : l’entité détient et contrôle les droits sur les actifs et les dettes correspondent aux obligations de l’entité ;
- présentation et intelligibilité : l’information financière est présentée et décrite de manière appropriée et les informations données dans l’annexe sont clairement présentées.
c. Techniques de contrôle
Le commissaire aux comptes choisit parmi les techniques suivantes celles qui lui permettront de collecter les éléments nécessaires dans le cadre de son audit des comptes :
- inspection des enregistrements ou des documents : examen des enregistrements et des documents internes ou externes ;
Exemple:
Examen d’une facture d’achat d’immobilisation et contrôle de sa correcte imputation (montant, classement, composants)
- observation physique : examen de la façon dont une procédure est exécutée au sein de l’entité ;
Exemple:
- assistance à l’inventaire physique des stocks ;
- contrôle de l’existence physique d’une immobilisation.
- demande d’information : adressée à des personnes internes ou externes à l’entité ;
Exemple:
Entretien avec les dirigeants pour connaître les faits marquants de l’exercice et les perspectives d’évolution de l’activité.
- demande de confirmation des tiers (ou circularisation) : obtention de la part d’un tiers d’une déclaration directement adressée au commissaire aux comptes concernant une ou plusieurs informations ;
Exemple:
Confirmation des comptes clients afin de s’assurer de l’exactitude et de la réalité des créances clients.
- vérification d’un calcul ;
Exemple:
- Contrôle du calcul de la provision pour hausse des prix.
- réexécution de contrôles, qui porte sur des contrôles réalisés à l’origine par l’entité ;
- Contrôle que les quantités livrées par un fournisseur correspondent bien aux quantités figurant sur la facture d’achat.
- procédures analytiques : appréciations d’informations financières à partir de leur corrélation avec d’autres informations et de l’analyse des variations significatives ou des tendances attendues.
- Revue analytique du compte de résultat de l’exercice N afin de déterminer et d’analyser les variations significatives des postes de charges et de produits par rapport à l’exercice N-1.
3. Les contrôles par sondages
Du fait de la nature de la mission d’audit, le commissaire aux comptes ne contrôle pas l’ensemble des transactions de l’entité mais est amené à utiliser la technique des sondages.
Deux types de sondage peuvent être distingués :
- les sondages empiriques, qui font appel au jugement du professionnel quant à la taille de l’échantillon et au choix des éléments à contrôler. Cette approche n’est pas considérée comme un sondage en audit car les résultats obtenus sont peu susceptibles d’être valables pour la population dans son ensemble.
Exemple:
Le commissaire aux comptes peut avoir recours à un échantillon non statistique s’il sait que pour les comptes clients, 20 % des comptes couvrent 80 % de la valeur totale. Il réalise alors son sondage sur les gros comptes et examine au hasard quelques-uns des comptes restants, considérant que la valeur totale de ces comptes n’est pas suffisamment élevée pour justifier un échantillonnage statistique.
- les sondages statistiques : la norme ISA 530 « Méthodes de sondages » définit les trois éléments principaux en matière de sondage en audit : la taille de l’échantillon, la sélection de l’échantillon et l’évaluation des résultats
a. Définition de la taille de l’échantillon
Pour définir la taille d’un échantillon, l’auditeur doit prendre en compte le risque d’échantillonnage, l’erreur tolérable et l’erreur escomptée :
- le risque d’échantillonnage est le risque que la conclusion à laquelle parvient l’auditeur sur la base d’un échantillon sélectionné puisse être différente de celle qui aurait été obtenue si l’évaluation avait porté sur l’ensemble de la population. Plus le risque d’échantillonnage accepté par l’auditeur est faible, plus la taille de l’échantillon devra être importante ;
- l’erreur tolérable est l’erreur maximale que l’auditeur peut accepter dans une population tout en concluant que les résultats du sondage ont atteint l’objectif de l’audit. L’erreur tolérable doit dépendre du seuil de signification fixé par l’auditeur. Plus l’erreur tolérable est faible, plus la taille de l’échantillon sera importante ;
- l’erreur escomptée est l’erreur que l’auditeur s’attend à trouver dans une population. Si l’auditeur s’attend à une erreur, il devra sélectionner un échantillon plus grand afin de s’assurer que l’erreur réelle n’est pas supérieure à l’erreur tolérable fixée.
b. Sélection de l’échantillon
L’auditeur doit sélectionner un échantillon représentatif de la population. Les méthodes de sélection courantes sont :
- la sélection aléatoire : cette méthode repose sur la base statistique la plus forte et doit être utilisée dans la mesure du possible. Tous les éléments de la population ont la même chance d’être sélectionnés ;
- la sélection systématique : cette méthode sélectionne les éléments en appliquant un intervalle constant entre chaque sélection, par exemple toutes les vingt pièces comptables ;
- la sélection au hasard : cette méthode est une alternative à la sélection aléatoire ou systématique.
c. Évaluation des résultats
Après avoir effectué des tests de procédures et des contrôles substantifs sur un échantillon, l’auditeur doit :
- analyser toutes les erreurs détectées dans l’échantillon ;
- projeter ces erreurs à l’ensemble de la population ;
- réévaluer le risque d’échantillonnage. Suite à cette démarche, l’auditeur peut envisager d’étendre les procédures d’audit.
BELEM Irissa
Merci pour votre sens du partage. Je trouve vos cours très bien expliqués, accessibles et d’une très grande clarté pédagogique.
Encore merci
SANI BOUBE
Je trouve ce cours intéressant et j’aimerai l’avoir si possible merci