Un changement dans la composition de la masse salariale impacte directement le montant de la masse salariale. Il s’avère important de connaître les principaux mouvements ainsi que les taux de variation les plus fréquents dans la gestion des ressources humaines.
L’effet Noria (effets de structure de la masse salariale)
L’effet Noria consiste à mesurer l’impact sur la masse salariale des entrées et sorties du personnel, lié à la différence de rémunération entre le titulaire du poste partant et le titulaire du poste arrivant.
Selon Le Robert et la source étymologique de ce mot, la noria est une machine hydraulique à godets qui sert à élever l’eau et qui fonctionne suivant le principe du chapelet hydraulique. Par analogie, la noria désigne en notre espèce les mouvements de main-d’œuvre.
L’effet Noria s’avère souvent négatif, puisque le salaire annuel brut du remplaçant est moins élevé que le salaire brut du partant. En effet, un salarié a été choisi par l’entreprise pour occuper un poste selon ses compétences. Le salarié évolue dans son poste, il connaît les procédures de l’entreprise, travaille plus efficacement et bénéficie de l’évolution de ses connaissances et compétences. L’entreprise valorise cette évolution par une augmentation de salaire. Au terme de plusieurs années, si ce salarié quitte l’entreprise ou tout simplement change de poste, le nouvel arrivant ne possédera pas toujours l’intégralité du savoir-faire. C’est pourquoi le nouvel arrivant pourrait être recruté à un salaire brut inférieur.
Nous pouvons relativiser l’effet Noria de plusieurs manières.
Tout d’abord, la décision de remplacer le départ d’un salarié par un candidat externe nécessite la définition d’un budget. Quelle fourchette de salaire sera attribuée à ce recrutement? L’entreprise se base le plus souvent sur le salaire du partant, qui déterminera le plafond à ne pas dépasser, tout en ayant pour objectif de dépenser moins. La décision de remplacer alors le partant par un nouvel arrivant moins expérimenté et donc aux prétentions salariales moins élevées provient d’une décision économique d’entreprise.
Ensuite, le candidat externe peut très bien avoir acquis les connaissances et compétences sur un même poste dans une autre entreprise. Dans ce cas, si un salaire inférieur au partant lui est proposé, il ne se justifie nullement.
Enfin, l’effet Noria n’est pas toujours négatif. En effet, des secteurs d’activité rencontrent des difficultés à recruter des talents dans leur cœur de métier. Dans ce contexte, le salaire brut proposé constituera l’adéquation entre les demandes du candidat et ce que l’entreprise peut offrir, déconnecté de la référence au salaire brut du partant.
La Noria représente la « marge de manœuvre » de la masse salariale, à savoir la variable d’ajustement qui permet de ne pas excéder le budget. Cependant, il s’avère intéressant de la calculer afin d’estimer le montant de cette marge de manœuvre justement!
Formule :
L’effet Noria se calcule de la manière suivante :
Formule de calcul en pourcentage :
(Salaire annuel brut de base moyen des arrivants – Salaire annuel brut de base moyen des partants) x nombre de mouvements prévus ÷ masse salariale initiale année N x 100
Puis nous calculons le montant en euro :
Taux de l’effet Noria x masse salariale totale initiale de la catégorie
Formule de calcul en euro :
Nombre de remplacements sur le poste x Différence de rémunération moyenne des arrivants et des partants.
Exemple : Prenons un poste d’ingénieur d’affaires junior. Dans cette entreprise de services, il existe 10 titulaires pour ce poste. Les salaires annuels bruts s’élèvent à: 30000 €, 32000 €, 28000 €, 35000 €, 30000 €, 27000 €, 38000 €, 30000 €, 34000 €, 40000 €.
Le turnover est important pour cette fonction dans l’entreprise de services concernée, quatre titulaires seront remplacés pendant l’année considérée. L’entreprise rémunérait les titulaires du poste qui ont quitté l’entreprise à: 35000 €, 34000 €, 38000 € et 32000 €. L’entreprise décide d’embaucher des jeunes sortis de leurs études avec une expérience professionnelle ne dépassant pas deux ans. Les salaires des arrivants s’élèvent à 32000 €, 30000 €, 28000 € et 34000 €.
Pour calculer l’effet Noria, calculons tout d’abord le salaire brut moyen des arrivants = (32000 € + 30000 € + 28000 € + 34000 €) ÷ 4 = 124000 € ÷ 4 = 31000 €
Calculons ensuite le salaire brut moyen des partants = (35000 € + 34000 € + 38000 € + 32000 €) ÷ 4 = 139000 € ÷ 4 = 34750 €
Calculons enfin la masse salariale totale du poste considéré = (30000 € + 32000 € + 28000 € + 35000 € + 30000 € + 27000 € + 38000 € + 30000 € + 34000 € + 40000 €) = 324000 €
Le taux de l’effet Noria s’élèvera donc à: (31000 € – 34750 €) x 4 ÷ 324000 € x 100 = – 4,63 %
L’économie réalisée grâce à l’effet Noria s’élève à 324000 x 4,63 % = 15000 €.
Selon la seconde méthode de calcul uniquement en euro: 4 remplacements x – 3750 € (différence de rémunération moyenne des arrivants et des partants) = – 15000 €
L’effet Noria (remplacement des salariés qui quittent l’entreprise) du poste d’ingénieur d’affaires junior pour cette entreprise de services permettra d’économiser 4,63 % de la masse salariale sur l’année considérée. En effet, l’entreprise a décidé de recruter des débutants uniquement.
Les indicateurs clés ressources humaines
Les indicateurs clés ressources humaines, et en particulier le taux d’absentéisme et le taux de turnover permettent de prendre en compte des coûts supplémentaires qui impacteront le budget « masse salariale ».
Le taux d’absentéisme
Le taux d’absentéisme représente la proportion de salariés absents de leur poste de travail alors qu’ils devraient théoriquement occuper leur poste. Il existe des absences inévitables dans la marche normale de l’entreprise. Par exemple, les salariées s’absentent pendant leur congé maternité, les collaborateurs partent en formation professionnelle, les employés tombent malades en particulier pendant la période hivernale. Tout dépend donc de la proportion des salariés absents. Un taux d’absentéisme élevé reflète souvent un climat social de l’entreprise dégradé.
L’absentéisme représente une charge supplémentaire pour l’entreprise.
Tout d’abord, lorsqu’un salarié s’absente et pendant les trois premiers jours de sa maladie dans le secteur privé, il n’est pas indemnisé par la Sécurité sociale. Cependant, les conventions collectives et les accords d’entreprise peuvent prévoir le paiement de ces jours de carence ainsi que le complément employeur entre le salaire brut de base et les indemnités journalières de Sécurité sociale, après un minimum d’ancienneté. Dans ce cas, la maladie d’un salarié représente un coût direct dès le premier jour d’absence.
Nous pouvons ainsi matérialiser l’indemnisation de l’arrêt maladie :
Indemnités journalières de la Sécurité sociale 50 % du salaire (le salaire est plafonné à 1,8 SMIC) | Complément employeur (Différence entre le salaire brut du salarié et les indemnités journalières de la Sécurité sociale) ==> Surcoût pour l’employeur |
Exemple d’indemnisation prévue dans une convention collective: La convention collective transport aérien personnel au sol prévoit l’indemnisation des arrêts maladie de la façon suivante :
Ancienneté | Employé | Agent de maîtrise | Cadre |
---|---|---|---|
De 1 à 5 ans | 2 mois = 100 % salaire + 2 mois = 50 % salaire | 2,5 mois = 100 % salaire + 2,5 mois = 50 % salaire | 3 mois = 100 % salaire + 3 mois = 50 % salaire |
De 5 à 10 ans | 2,5 mois = 100 % salaire + 2,5 mois = 50 % salaire | 3 mois = 100 % salaire + 3 mois = 50 % salaire | 4 mois = 100 % salaire + 4 mois = 50 % salaire |
De 10 à 15 ans | 3 mois = 100 % salaire + 3 mois 50 % salaire | 4 mois = 100 % salaire + 4 mois = 50 % salaire | 5 mois = 100 % salaire + 5 mois = 50 % salaire |
Plus de 15 ans | 4 mois = 100 % salaire + 4 mois = 50 % salaire | 5 mois = 100 % salaire + 5 mois = 50 % salaire | 6 mois = 100 % salaire + 6 mois = 50 % salaire |
À la fin des périodes susmentionnées, le salarié bénéficie uniquement de l’indemnisation de la sécurité sociale.
Ensuite, le salarié absent temporairement nécessite un remplacement afin que son travail soit effectué. Le salarié peut être remplacé de deux manières :
- Soit l’entreprise embauche un personnel temporaire extérieur à l’entreprise, du personnel intérimaire ou un contrat de travail à durée déterminée.
- Soit l’entreprise répartit le travail du salarié absent auprès de ses collègues, ce qui peut entraîner le paiement d’heures supplémentaires.
Enfin, l’absence non programmée d’un salarié entraîne une désorganisation du service et une perte de productivité. Ces coûts cachés se révèlent parfois importants, notamment lorsque l’absence d’un salarié entraîne des contraintes sur les autres salariés, lesquels se démotivent.
Le taux d’absentéisme se compose d’absences de courte durée et d’absences de longue durée. La maladie, la maternité, la paternité, l’accident de trajet ou de travail, la maladie professionnelle et les absences injustifiées représentent les causes d’absence. L’entreprise peut choisir de focaliser son attention sur les absences les plus problématiques, par exemple la maladie ordinaire répétitive, les absences injustifiées, les accidents du travail et maladies professionnelles.
Dans des environnements de production, le taux d’absentéisme se trouve particulièrement suivi, notamment pour l’incidence sur le niveau de production et l’organisation des plannings. L’absentéisme peut également impacter la qualité de service.
Étudions tout d’abord les facteurs déclencheurs de l’absence.
Les conditions de travail jouent un rôle dans le processus qui conduit un salarié à s’absenter. En effet, un travail pénible, des horaires décalés, l’ambiance de travail ou la conciliation difficile entre vie privée et vie professionnelle peuvent provoquer des absences répétées et/ou injustifiées de salariés.
L’absentéisme découle également de l’organisation du travail. L’exigence du poste, le manque de reconnaissance de la performance ou l’écoute défaillante du manager peuvent entraîner une insatisfaction du salarié. L’absentéisme se révèle une indication du degré de satisfaction des salariés.
Ces causes objectives d’absentéisme nécessitent un diagnostic. L’état des lieux des facteurs déclencheurs permettra à l’entreprise de mettre en place une démarche de réduction de l’absentéisme.
En dernier lieu, l’absentéisme provient aussi de salariés qui ne sont pas loyaux et n’exécutent pas leur contrat de travail de bonne foi. Une fois identifiés, l’entreprise prendra les mesures nécessaires, notamment par le dialogue, afin de faire cesser ces agissements.
L’absentéisme entraîne des coûts directs mesurables et des coûts indirects induits.
Formule :
Le taux d’absentéisme se mesure en deux temps :
Nombre moyen de jours d’absence par salarié = Nombre total de jours d’absence pendant année N ÷ effectif moyen annuel pendant année N
Taux d’absentéisme = Nombre moyen de jours d’absence par salarié ÷ 365 jours x 100
Des études évaluent régulièrement le taux d’absentéisme en France, comme le baromètre de l’absentéisme. Il n’existe pas de taux d’absentéisme de référence, à laquelle l’entreprise devrait tendre. En effet, l’absentéisme doit être solutionné dès lors que le coût et les dysfonctionnements nés de ces absences deviennent problématiques pour la bonne marche de l’entreprise.
L’ANACT, (Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail), à la demande d’entreprises confrontées à un absentéisme croissant, s’est attelée à la compréhension de ce phénomène. Les acteurs impliqués dans la gestion de l’absentéisme disposent des actions de prévention parmi lesquels: revisiter l’organisation du travail, construire des perspectives professionnelles, faciliter la conciliation des temps travail et hors travail, prévenir les pathologies professionnelles, prévenir l’usure professionnelle liée à l’âge.
Mise en pratique Société EXELV :
La société d’édition française EXELV a rencontré un absentéisme croissant pendant l’année N. La société applique la convention collective nationale de l’édition du 14 janvier 2000, IDCC 2121, laquelle prévoit le maintien intégral des appointements après un an de présence dans l’entreprise. La direction souhaite endiguer le phénomène et mesurer l’impact de cet absentéisme. Le contrôleur de gestion sociale va calculer le nombre moyen de jours d’absence par salarié, le taux d’absentéisme et le coût direct lié à ces absences.
Les données à disposition dans la société EXELV:
Effectifs
Janvier | Février | Mars | Avril | Mai | Juin |
45 | 45 | 45 | 47 | 47 | 47 |
Juillet | Aout | Septembre | Octobre | Novembre | Décembre |
48 | 51 | 48 | 48 | 50 | 50 |
Nombre de jours calendaires d’absence
Janvier | Février | Mars | Avril | Mai | Juin |
28 | 38 | 14 | 5 | 15 | 20 |
Juillet | Aout | Septembre | Octobre | Novembre | Décembre |
22 | 35 | 24 | 12 | 15 | 42 |
Masse salariale (salaires bruts)
Janvier | Février | Mars | Avril | Mai | Juin |
195000 € | 200625 € | 201375 € | 205233 € | 211500 € | 211892 € |
Juillet | Aout | Septembre | Octobre | Novembre | Décembre |
217200 € | 230350 € | 214000 € | 213600 € | 223333 € | 223333 € |
Indemnités journalières de la Sécurité sociale perçues
Janvier | Février | Mars | Avril | Mai | Juin |
840 € | 966 € | 336 € | 84 € | 504 € | 588 € |
Juillet | Aout | Septembre | Octobre | Novembre | Décembre |
672 € | 1092 € | 504 € | 378 € | 504 € | 1134 € |
Calculons tout d’abord le nombre moyen de jours d’absence par salarié :
(28 + 38 + 14 + 5 + 15 + 20 + 22 + 35 + 24 + 12 + 15 + 42) = 270 jours calendaires d’absence
(45 + 45 + 45 + 47 + 47 + 47 + 48 + 51 + 48 + 48 + 50 + 50)/12 = 48 salariés en moyenne sur l’année
270 jours ÷ 48 effectif moyen = 5,67 jours d’absence en moyenne par salarié
Calculons ensuite le taux d’absentéisme :
5,67 jours d’absence en moyenne par salarié ÷ 365 jours x 100 = 1,55 %
Calculons enfin le coût direct lié aux absences, à savoir le coût salarial. Nous partirons de l’hypothèse que les salariés ont tous plus d’un an d’ancienneté.
Pour cet exercice, ne possédant pas la liste des salariés et de leur salaire, nous simplifierons notre calcul.
La première méthode consiste à calculer le coût grâce au taux d’absentéisme : Masse salariale 2547442 € x 1,55 % = 39602 € bruts, auxquels il faut rajouter les charges patronales.
Coût direct: 39602 € + (39602 € x 48 % taux forfaitaire) = 58611 €
La deuxième méthode consiste à utiliser le salaire moyen journalier : Masse salariale 2547442 € ÷ 48 effectif moyen = 53071 € par an.
– Salaire moyen journalier (53071 ÷ 365 = 145,40 €) x 270 jours d’absence = 39258 €
Coût direct: 39258 € + (39258 € x 48 % taux forfaitaire) = 58101 €
Nous remarquerons que les deux méthodes tendent au même résultat. Bien sûr, ces calculs illustrent des tendances, et non pas le coût précis qui sera calculé avec les salaires réels des collaborateurs.
Le taux de turnover
Le turnover est un anglicisme pour désigner la rotation de la main-d’œuvre, à savoir les mouvements de personnel en entrées et sorties qui impactent l’entreprise. Cet indicateur met en valeur le rythme de renouvellement dans l’entreprise.
Les entrées du personnel se caractérisent par les embauches en contrat à durée indéterminée, à durée déterminée, sous contrat spécifique ou intégration de salariés d’autres filiales d’un même groupe.
Les sorties se caractérisent par les fins de contrats à durée déterminée ou spécifiques, les démissions, licenciements pour motif économique et autre motif, rupture conventionnelle, fin de période d’essai, départs à la retraite, fin de détachement d’une filiale du groupe.
Le turnover impacte d’une part l’organisation de l’entreprise et d’autre part ses coûts.
En premier lieu, lorsqu’un salarié intègre l’entreprise, il se trouve en phase d’exploration et de découverte. Il découvre l’entreprise, ses procédures, ses interlocuteurs et parfois même un secteur d’activité. Pendant cette phase, le salarié, même s’il est expérimenté sur son métier, n’utilise pas le maximum de ses capacités. Après cette phase d’intégration, le salarié entame une période de croissance et de développement. Ensuite, il atteint la maturité à son poste. Lorsqu’il utilise complètement ses compétences et connaissances, il aspire souvent à évoluer vers de nouvelles responsabilités. Dans le cas où l’entreprise n’offrirait pas des opportunités de carrière pertinentes, le salarié pourrait être tenté de quitter l’entreprise. Le départ d’un employé entraîne un questionnement dans l’organisation de l’équipe. Certains collaborateurs en profitent pour récupérer des missions qu’ils convoitaient. Le chef de service peut décider alors de mouvements ou de changements de répartitions de tâches.
En second lieu, l’entreprise est impactée en termes de coût. En effet, lorsque le salarié, nouvellement intégré, se trouve en phase d’intégration, il ne remplit pas le poste à 100 %. Cet état de fait génère un coût pour l’entreprise. De plus, quand le recrutement le permet, l’entreprise alloue un temps de passation de poste, pendant lequel l’ancien titulaire du poste et le nouveau cohabitent, afin de transmettre le savoir. L’ancien titulaire explique ses méthodes de travail, son organisation, les interlocuteurs internes. Si l’entreprise dispose de procédures écrites, la passation sera facilitée. L’entreprise doit régler alors deux coûts salariaux de manière concomitante, à savoir deux personnes pour un même poste. Cependant, il s’agit d’une économie à moyen terme car le temps consacré à transmettre le savoir par l’ancien titulaire permettra de raccourcir la phase d’intégration du nouveau titulaire. En clair, le nouvel embauché sera opérationnel à son poste plus rapidement.
Au moment du départ d’un salarié, l’entreprise supporte des coûts supplémentaires. En effet, lorsqu’une entreprise décide de licencier un salarié pour motif personnel ou économique, s’il possède beaucoup d’ancienneté, l’entreprise paiera une indemnité de licenciement élevée ainsi que le paiement d’un préavis non effectué. De plus, si le salarié possède un reliquat de congés payés, la facture s’alourdit.
L’entreprise supporte des coûts cachés du fait de la rotation du personnel. Un salarié qui s’apprête à quitter l’entreprise se démotive, ce qui entraîne un risque plus élevé d’erreurs dans la réalisation de la mission, une perte d’efficacité et de qualité du travail effectué. De plus, toutes les compétences acquises par un collaborateur pendant son emploi dans l’entreprise risquent d’être perdues si la transmission du savoir ne s’est pas effectuée de manière écrite à travers des procédures ou vers le remplaçant ou les collègues. Enfin, pour certains métiers notamment commerciaux, il ne faut pas négliger le risque de concurrence après le départ du salarié, qui se traduit par la captation de la clientèle.
La formule de calcul du taux de turnover est la suivante :
Nombre d’entrées (année N) + nombre de sorties (année N) ÷ effectif moyen (année N) x 100
Le turnover n’est pas forcément un fardeau pour l’entreprise. Un faible taux de turnover des CDI indique que l’entreprise sait fidéliser ses salariés. La stabilité de la main-d’œuvre facilite les gains de productivité. Le turnover permet aussi de renouveler le personnel, d’apporter des idées nouvelles avec des salariés qui intègrent l’entreprise avec leurs expériences passées. Ce renouvellement contribue au dynamisme de l’entreprise.
Le taux de turnover indique le renouvellement de la structure de l’entreprise, et nécessite d’être mesuré. Nous établirons le lien entre le taux de turnover élevé et la pertinence de calculer l’effet Noria.
Selon la dernière étude de la DARES, Direction de l’animation de la recherche des études et des statistiques, sur les mouvements de main-d’œuvre, le taux de rotation, moyenne des taux d’entrée et de sortie, s’établit à 50,2 % dans les établissements d’un salarié et plus en France métropolitaine. Ces statistiques laissent apparaître un taux très élevé de renouvellement des CDD. En effet, le taux d’entrée des CDD s’élève à 40 % alors que le taux de CDI à 11,1 %. En parallèle, le taux de fin de CDD se monte à 35,2 % alors que le taux de fin de CDI représente 13 %. Si nous calculons le taux de rotation des CDI uniquement, il représente 12 %, ce qui se montre plus cohérent avec la réalité de l’entreprise. Certaines activités s’exposent à des rotations élevées, telles que les centres d’appels, les services à la personne. La rotation élevée trouve sa cause principalement dans les conditions de travail contraignantes pour les salariés.
Mise en pratique Société ABIL
La société de mécanique de précision, ABIL, subit une rotation élevée de sa main-d’œuvre. ABIL emploie 450 salariés. La société est rattachée à la convention collective de la métallurgie. La direction souhaite une étude sur le turnover. Les données à disposition dans la société ABIL :
Effectifs
Janvier | Février | Mars | Avril | Mai | Juin | Juillet | Aout | Sep | Octo | Nov | Déc |
450 | 390 | 380 | 422 | 469 | 466 | 480 | 410 | 420 | 480 | 500 | 500 |
Nombre d’entrées
Janvier | Février | Mars | Avril | Mai | Juin | Juillet | Aout | Sep | Oct | Nov | Déc | |
CDD | 8 | 3 | 6 | 2 | 14 | 8 | 2 | 0 | 12 | 6 | 3 | 4 |
CDI | 3 | 5 | 2 | 0 | 2 | 2 | 1 | 0 | 8 | 3 | 2 | 0 |
Nombre de sorties
Janvier | Février | Mars | Avril | Mai | Juin | Juil | Aout | Sep | Oct | Nov | Déc | |
Fin de CDD | 9 | 9 | 5 | 7 | 6 | 8 | 8 | 4 | 3 | 5 | 3 | 2 |
Fin de Cdi | 2 | 1 | 3 | 0 | 1 | 2 | 1 | 0 | 2 | 2 | 1 | 2 |
..don démission | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 | 0 |
..licenciement | 0 | 0 | 1 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 |
..rupture conventionnelle | 1 | 0 | 1 | 0 | 0 | 1 | 0 | 0 | 1 | 1 | 0 | 1 |
..départ à la retraite | 0 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 1 | 0 | 0 | 1 | 0 | 0 |
..fin de période d’essai | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 |
Étant donné la proportion significative de CDD dans la société ABIL, il s’avère pertinent de différencier le turnover des salariés en CDD d’une part et les salariés en CDI d’autre part.
Dans un premier temps, calculons l’effectif moyen annuel:
(450 + 390 + 380 + 422 + 469 + 466 + 480 + 410 + 420 + 480 + 500 + 500) ÷ 12 = 447
Le taux de turnover des CDD s’élève à:
(8 + 3 + 6 + 2 + 14 + 8 + 2 + 0 + 12 + 6 + 3 + 4) = 68 entrées de CDD dans l’année.
(9 + 9 + 5 + 7 + 6 + 8 + 8 + 4 + 3 + 5 + 3 + 2) = 69 sorties de CDD dans l’année.
(68 + 69) ÷ 447 x 100 = 31 % taux de turnover des CDD.
Il s’agit d’un chiffre élevé qui entraîne des implications au niveau ressources humaines:
– temps de recrutement des CDD;
– gestion des contrats de travail;
– gestion de la paie;
– temps d’intégration.
La rotation élevée des CDD entraîne également des conséquences au niveau opérationnel:
– temps d’assimilation des instructions;
– temps d’intégration;
– passation au moment du départ.
Le taux de turnover des CDI s’élève à :
(3 + 5 + 2 + 0 + 2 + 2 + 1 + 0 + 8 + 3 + 2 + 0) = 28 entrées de CDI dans l’année.
(2 + 1 + 3 + 0 + 1 + 2 + 1 + 0 + 2 + 2 + 1 + 2) = 17 sorties de CDI dans l’année.
(28 + 17) ÷ 447 x 100 = 10 % taux de turnover des CDI.
Il est intéressant d’analyser les motifs de sortie des CDI. La première cause de sortie est la rupture conventionnelle, suivie à égalité de la démission, licenciements et départs à la retraite. Nous écarterons les départs à la retraite qui représentent un mouvement naturel de main-d’œuvre.
Si nous étudions dans l’ensemble le taux de turnover de la société ABIL, nous établirons que le turnover provient d’événements naturels, à savoir la fin des contrats à durée déterminée, les départs à la retraite et d’événements sur lesquels l’entreprise peut agir avec des politiques ressources humaines adaptées.
La masse salariale constitue l’élément prépondérant des dépenses en frais de personnel. Le contrôleur de gestion sociale s’attachera à appliquer les politiques de rémunération, internes à l’entreprise.
La création et l’analyse des indicateurs clés ressources humaines contribueront à améliorer le pilotage de la masse salariale.
Merci pour tous ces supports. Ils ont bien illustres.