Les provisions pour risques et charges tout comme les dotations pour dépréciation de valeurs d’actif consistent à constater des pertes probables, mais qui ne sont pas encore évaluées de manière définitive.En comptabilité, le principe de prudence oblige à constater au bilan des moins-values probables, mais ne permet pas, par contre, de constater des plus-values latentes.
Par exemple, l’entreprise va évaluer la somme qu’elle devra probablement payer pour un litige aux prud’hommes dont l’issue n’est pas encore connue à la fin de l’exercice: elle la constatera par une provision pour risques et charges à son bilan. Autre exemple: elle sait qu’une partie de son stock risque de ne plus se vendre l’an prochain, car il est techniquement obsolète, elle va donc évaluer cette dépréciation et porter à son bilan une dotation pour dépréciation de valeurs d’actif.
Par contre, même si elle estime qu’un stock de marchandises a de grandes chances de bien se vendre l’an prochain du fait de circonstances liées à l’environnement (mode, pénurie…), il lui est interdit d’évaluer ce stock, dans son bilan, à son prix de vente présumé, tant qu’il n’est pas vendu.
Il s’agit donc, pour la préparation du bilan, de constater uniquement des pertes que l’on estime probables mais qui ne sont pas encore avérées à la fin de l’exercice comptable.
Rajoutons que les provisions pour risques et charges et les dotations pour dépréciation ne relèvent pas de l’activité normale de l’entreprise, mais plutôt d’événements exceptionnels.
En revanche, si la perte est déjà connue au cours de l’exercice (un litige clos par un jugement définitif, par exemple), il faut enregistrer la perte:
il n’y a pas lieu de laisser en provision une perte qui est déjà avérée. Il faut toujours traiter ces provisions et ces dotations avec soin :
- d’une part parce que l’exercice consistant à évaluer des pertes qui ne seront connues que dans le futur est difficile (comment savoir si, dans un an, un client va être en mesure d’honorer tout ou partie de ses factures impayées ?) ;
- d’autre part, les provisions étant enregistrées en charges puisque ce sont des pertes potentielles, ces charges vont diminuer le résultat et donc l’impôt; ces provisions peuvent alors susciter une observation particulière de la part des services fiscaux.
Il est donc important d’imputer les provisions en fonction de critères rigoureux et vérifiables et, même si le montant définitif des pertes probables est par nature inconnu, il est indispensable d’en faire une estimation aussi précise que possible. Imaginons l’exemple d’un litige en cours de procès : on connaît la somme globale réclamée par la partie adverse, mais, comme l’avocat qui conseille l’entreprise estime qu’une grande partie des griefs est infondée, on va pouvoir provisionner le risque de perdre à hauteur de 50 % seulement, par exemple. C’est généralement le chef d’entreprise qui valide les provisions pour risques et les dotations pour dépréciation de l’actif.
Voyons maintenant en détail comment on enregistre comptablement ces risques et ces dépréciations.
Les provisions pour dépréciation des actifs
Il arrive que certains postes de l’actif risquent d’être dévalorisés du fait d’événements particuliers:
• Quand les immobilisations encourent un risque de dépréciation (un terrain dévalué du fait d’un marché de l’immobilier difficile); on utilise alors le compte 29 – Dépréciations des immobilisations.
• Quand le stock encourt un risque de dépréciation (une partie du stock est abîmée); on utilise alors le compte 39 – Dépréciations des stocks et en-cours.
• Quand certains comptes de tiers sont supposés occasionner une perte (retards de paiement de certains clients dont la solvabilité douteuse est connue); on utilise alors le compte 49 – Dépréciations des comptes de tiers.
• Quand certains comptes de trésorerie risquent de subir une dépréciation (portefeuille d’actions dévalué du fait de la crise économique); on utilise alors le compte 59 – Dépréciations des comptes financiers.
Concernant la dépréciation des comptes clients pour risques d’impayés, l’entreprise peut examiner au cas par cas quels comptes présentent des risques. Toutefois, le mieux est que l’évaluation repose sur des règles que l’entreprise aura préalablement choisies et auxquelles elle se conformera d’année en année. Elle peut avoir décidé,par exemple, de provisionner à 100 % les sommes impayées des clients en liquidation judiciaire, à 50 % les sommes que les clients n’ont pas payées après une injonction de payer, à 25 % celles des clients ayant un retard de paiement de 6 mois malgré 6 relances…
L’important est de fixer des règles d’évaluation et, surtout, de ne pas y déroger d’une année à l’autre, en vertu du principe comptable de permanence des méthodes. Sinon, changer les règles pour modifier le résultat à sa convenance pourrait aussi engendrer un «risque» difficile à justifier auprès des services fiscaux.
Les dépréciations sur les comptes clients s’enregistrent en hors taxes: même s’il est sûr que certaines factures demeureront définitivement impayées, on a la possibilité d’en récupérer la TVA, conformément aux dispositions fiscales. Les dépréciations sur les immobilisations et les stocks se font aussi en hors taxes.
Voici l’écriture pour une créance client de 3 000 € HT, estimée douteuse et constituant un risque à 50 %.
Remarque : le compte 681 est utilisé à la fois pour les dotations aux amortissements (que nous avons déjà vues) et pour les dotations aux dépréciations ou aux provisions. En réalité, ce compte se décompose en sous-comptes qui différencient chaque destination – amortissements, dépréciations, provisions… -, mais ici il nous a paru souhaitable de simplifier en utilisant les trois premiers chiffres de ce compte général.
Les dotations aux dépréciations et aux provisions, tout comme les dotations aux amortissements, sont des charges – au même titre que les achats de marchandises, les factures de prestations, les charges de personnel. .. que l’entreprise aura à payer tôt ou tard. La différence est que les dotations représentent des charges dont on ne connaît pas le montant exact à payer et qu’elles n’ont pas un impact direct sur la trésorerie.
On peut donc considérer les dotations comme de l’argent mis de côté en prévision de… Et parfois la provision ne donne lieu à aucune charge dans le futur (exemples : l’entreprise gagne aux Prud’hommes, le portefeuille d’actions voit son évaluation repartir à la hausse…).
Imaginons maintenant que l’on prépare le bilan 2016, quel sort va-t-on donner aux dotations pour dépréciation passées en 2015 ? Trois situations sont possibles:
1. Si le risque s’accroît, on va augmenter la dotation.
2. Si le client paye partiellement ou si le risque diminue, on va diminuer la dotation.
3. Si la perte est définitive, on va reprendre la dotation et constater la perte.
1. Le risque s’accroît
Si on reprend l’exemple précédent et que le risque s’accroît sur la créance de 3000 €, on décide d’augmenter la provision en passant un complément de dotation de 500 €.
2. Le risque diminue ou le client paye
Finalement le client paye, partiellement ou totalement, ce qui veut dire que le risque est devenu moindre ou nul. On reprend alors, partiellement ou totalement, la dotation. Pour reprendre une dotation, on utilise le compte 781 – Reprises sur amortissements, dépréciations et provisions (et non le compte 681).
3. La perte est définitive
On apprend que finalement le client ne paiera jamais et l’impayé est irrémédiablement perdu: on va constater la perte avec le compte 654 – Perte sur créances irrécouvrables, car créance et dotation n’ont plus lieu d’être, et on constate la perte dans le compte 411 – Clients.
Les provisions pour risques et charges
Les provisions pour risques et charges fonctionnent comme les dépréciations des éléments de l’actif, sauf qu’elles prennent en compte une perte probable au profit de tiers, et non en fonction de dépréciations sur les actifs.
Il peut s’agir, par exemple, de remboursements à effectuer dans le cadre d’une garantie clients: une entreprise a vendu 10 000 ordinateurs en 2015, mais elle apprend de ses services techniques que 5 % des ordinateurs ont un défaut de fabrication.
Ce défaut oblige l’entreprise à effectuer, dans le cadre de la garantie, des réparations dont la charge est estimée à 150 € par ordinateur défectueux. Elle estime à 75 000 € la charge probable à payer en 2016 pour 500 ordinateurs (5 % de 10 000), sachant que le coût de réparation à l’unité est de 150 € (500 x 150 €).
Pour préparer le bilan, on passe la provision pour risques dans le journal des opérations diverses ainsi.
Quand la provision n’a plus lieu d’être, on l’annulera avec le compte 781 – Reprises sur amortissements, dépréciations et provisions.
Cas pratique : Provisions pour risques
Pour la préparation du bilan 2015, vous devez passer des écritures correspondant à des provisions:
- une provision pour un risque d’impayé client: 10000 €;
- la reprise d’une provision pour un litige aux Prud’hommes estimé à 50000 €.
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