Les contraintes financières de Rentabilité et de solvabilité ne sont ni redondantes, ni indépendantes : il se peut très bien qu’une entreprise soit à la fois solvable et peu ou pas rentable à un moment donné. Cependant, sur la longue période, la rentabilité est un des ressorts structurels de la solvabilité. Ce n’est cependant ni le seul, ni le plus direct.
Rentabilité et solvabilité
La rentabilité
La rentabilité se manifeste sous deux aspects différents mais liés dans l’activité
courante de l’entreprise :
- elle est un revenu, et donc un moyen de rémunérer certains apporteurs de ressources, tel les actionnaires ;
- elle est un indicateur du rendement et de l’efficacité dans l’allocation des ressources. Ce dernier point est dépourvu d’ambiguïté.
Fondamentalement, la rentabilité résulte d’une comparaison des résultats par rapport aux moyens mis en oeuvre pour les obtenir :
Résultat obtenu /Moyens mis en oeuvre
Le capital économique représente une mesure traditionnelle des ressources et des moyens mis en oeuvre dans l’entreprise. Ces ressources sont rares et onéreuses. Il faut donc les allouer rationnellement. L’idée de bon sens du calcul économique est de diriger les ressources disponibles vers les emplois dont le rapport résultats/ moyens est le meilleur possible, ou au moins supérieur à l’unité.
On retrouve ici la logique économique de création de valeur. Cette valeur créée servant à rémunérer les apporteurs de capitaux et les parties prenantes de l’entreprise. Le non-respect de cette contrainte absolue de création de valeur à long terme entraîne la fin de l’entreprise en tant qu’entité économique efficace et utile.
Est-ce à dire pour autant que la finalité de l’entreprise réside invariablement dans la maximisation de la richesse des actionnaires ? Cet objectif est bien celui que retient la théorie financière moderne. Celle-ci présente l’immense avantage d’aboutir à des règles normatives simples qui sont des guides utiles pour la prise de décision.
On peut, en effet, montrer que maximiser le montant des flux issus d’un investissement équivaut à maximiser la richesse nette des actionnaires. Ce résultat est cependant une première approximation et fait l’impasse sur la rémunération des autres apporteurs de ressources que sont les prêteurs. Il peut apparaître des phénomènes de transfert de richesse des prêteurs vers les actionnaires ou inversement.
C’est le cas, par exemple, en cas de défaillance de l’entreprise lorsque les créanciers ne sont pas remboursés.
La rentabilité est donc une contrainte financière qui ne se définit pas uniquement par référence à la rémunération des actionnaires. Elle est un des éléments qui entre dans le calcul à long terme des exigences des prêteurs, notamment des banques dans le cadre de l’analyse crédit.
La solvabilité
La solvabilité est la seconde contrainte financière de survie de l’entreprise. Elle est l’aptitude de l’entreprise à assurer durablement le paiement de ses dettes exigibles. Il s’agit d’une contrainte majeure : l’incapacité de l’entreprise à rembourser ses dettes est le constat de sa défaillance qui généralise la cessation des paiements à l’ensemble des relations qu’elle entretient avec ses partenaires économiques, en particulier les prêteurs et les fournisseurs. Ce constat est le fait générateur de procédures amiables ou judiciaires qui, dans la généralité des cas, mènent à la disparition de l’entreprise originelle ou au départ de ses dirigeants. L’entreprise, en tant qu’entité économique autonome, ne survit pas à une absorption, à une reprise ou à une liquidation de biens.
L’état de solvabilité résulte d’une correspondance entre les flux de monnaie, entre les diverses recettes et les diverses dépenses. L’analogie est possible avec un réservoir qui serait alimenté par une vanne (les encaissements de toutes natures), et qui serait vidé par une autre vanne (les décaissements de toutes natures). La contrainte de solvabilité à très courte échéance, aussi appelée liquidité, impose que le réservoir ne soit jamais totalement vide. L’image du réservoir symbolise l’encaisse de l’entreprise. Il faut qu’il soit suffisamment rempli.
Il y a deux manières différentes d’appréhender la contrainte de solvabilité :
Solvabilité à très court terme:
Le problème est celui de la solvabilité immédiate. Pour assurer les paiements qu’elle ne peut différer, l’entreprise ne peut compter que sur les encaissements et les disponibilités monétaires en caisse. Pour être solvable le jour j, il faut que l’inégalité suivante soit satisfaite :
Décaissements j ≤ Encaissements j + Stock monnaie (j – 1)
Ce qui prédomine est ici la liquidité de l’entreprise. L’insolvabilité immédiate est l’expression d’une illiquidité qui ne peut être qu’une simple panne technique passagère et qui ne signifie pas forcément la défaillance irréversible de l’entreprise vis-àvis des tiers.
Une analyse de la solvabilité uniquement à très court terme serait cependant critiquable, car elle conduirait à privilégier une attitude au jour le jour. Il ne faut pas oublier que la solvabilité à un instant donné peut être uniquement l’anticipation d’un état d’insolvabilité futur. Les deux exemples suivants en sont des illustrations :
- l’entreprise aux abois vend en catastrophe ses équipements et ses actifs. Cela entraîne naturellement des rentrées importantes de fonds, mais en dilapidant son capital économique, l’entreprise n’a plus de substance ;
- l’entreprise qui a utilisé au maximum toutes ses possibilités de recours au crédit se retrouve dans une situation critique même si elle n’est pas aujourd’hui insolvable. Dans de telles circonstances, il suffit d’un accident conjoncturel pour révéler l’insolvabilité latente.
Solvabilité à plus long terme:
Pour que l’entreprise soit solvable de manière durable, il faut qu’elle puisse payer ses dettes de manière continue dans le futur prévisible. Cela n’est possible que si globalement l’ensemble constamment renouvelé des flux d’encaissements est structurellement supérieur à l’ensemble constamment renouvelé des flux de dépenses. C’est la notion fondamentale d’équilibre financier entre flux qui est à la base de la solvabilité structurelle de l’entreprise.
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